Lorsque Youssou N’dour chante à Dakar, c’est « l’événement ». Il n’a pas besoin d’un grand tapage publicitaire pour attirer la foule. La nouvelle de ses concerts nocturnes court plus vite qu’une brise océane. Justement, ce soir il est annoncé au Thiossane, la célèbre discothèque de la banlieue dakaroise. Reportage.
Il est inutile de préciser le lieu au jeune taxieur. Il le sait déjà. Le mot de passe : Youssou N’dour. Ce soir, les radios libres de la capitale sénégalaise diffusent des morceaux choisis de son répertoire, histoire de mettre l’eau à la bouche. Et le taxieur s’arrange de vous préciser : « Youssou N’dour est le chanteur le plus célèbre du Sénégal ». Non, mais vous blaguez ?! Il est number one in Africa et il est le meilleur dans son style : le mballax (prononcez mbalakh). Une musique typiquement sénégalaise qui fait désormais partie de la world music. C’est simple : Youcef ou Youssou N’dour est une star mondiale.
Mot de passe : Youssou
L’homme fait fructifier sa célébrité pour lancer des projets utiles à son pays. Il est patron du groupe de presse Info 7 (un journal et une station de radio FM) et d’un certain nombre de lieux de détente. Devant l’entrée du Thiossane, il y a foule. Payez 3000 FCFA et vous êtes envoyé au ciel étoilé du mballax. Dans le hall, on propose pour 5000 FCFA les trois derniers CD de Youssou N’dour. Joko, From Village To Town, le dernier album, est un véritable bijou. Youssou N’dour y chante Don’t Walk Away avec Sting.
La star anglaise du pop fait visiblement le tour des plus belles voix africaines puisque, à peine a-t-il « consommé » le succès planétaire de Desert rose avec Cheb Mami, il s’associe à l’artiste le plus aimé du Sénégal. Youssou N’dour a – il faut le dire sans honte – permis à Peter Gabriel de revenir par la grande porte grâce à This Dream, un des titres phares du dernier album. En featuring, il y a aussi cet autre monstre de la r’n’b, Wyclef Jean, très heureux de surfer sur How come ?
Il fait sombre à l’intérieur du Thiossane. Comme dans un dancing de Berlin, Londres ou Rome. Des lumières rouges, vertes et jaunes déchirent le noir ambiant. On s’entasse comme on peut dans les rares places encore libres. Une heure du matin. L’artiste n’est pas encore arrivé. Le groupe Super Etoile chauffe les clubbers avec du mballax pur sucre. On ne se rend presque pas compte de l’entrée de Youssou N’dour. Discret et timide, le chanteur prend place à côté de la scène, vêtu d’un ensemble bleu ciel et attend son tour. Pas de grandes manières. Ses fans le respectent et ne se bousculent pas autour de lui. Sans s’annoncer, il gagne la scène et entre vite dans le vif du sujet.
Voir Dakar et y danser
Sur la piste de danse, c’est le délire. Des Sénégalais et des touristes, à la recherche sans doute d’émotions fortes, suivent le rythme endiablé des percussions. Une véritable thérapie ! À la pause, Youssou N’dour, avec une gentillesse incomparable, accepte de prendre des photos souvenirs avec nous et avec des amis africains. Il ne cache pas son bonheur lorsqu’on lui annonce qu’il est célèbre en Algérie et qu’on l’adore. Il se contente d’un « merci, merci » presque gêné.
L’artiste n’est pas porté sur les discours en contreplaqué ! Il dit les choses simplement. Avec de la musique et de la poésie avec son natal wolof (le dialecte sénégalais) : Wiri-Wiri, Birima, Yama, Red Clay, New Africa et d’autres titres. De la crème chantilly ! Et lorsqu’on quitte le Thiossane aux premières lueurs d’une matinée sereine, on a toujours faim. On veut encore du Youssou N’dour. Peut être une autre fois à Alger. En attendant, Dakar dort encore et ses taxieurs font de bonnes affaires…
Par Fayçal Metaoui, envoyé spécial à Dakar de notre partenaire El Watan