Initiative originale : Justin Kadima, natif de la République démocratique du Congo, organise du 31 octobre au 2 novembre, un salon dédié au chanvre et à ses dérivés, à la Foire de Kinshasa. Explications de cet hardi défenseur de la petite feuille dentelée.
Du 31 octobre au 2 novembre, la foire de Kinshasa, en République démocratique du Congo, accueille le cannabis sous toutes ses formes. Un salon dédié au chanvre et à ses dérivés ? Oui, et plutôt deux fois qu’une ! réplique l’organisateur Justin Kadima. Ce Congolais qui vit depuis 15 ans en Allemagne a embrassé la cause cannabique depuis longtemps déjà et lutte pour la légalisation de la plante, réduite encore trop souvent à son effet hallucinogène.
Afrik : C’est la première manifestation de ce genre en République démocratique du Congo ?
Justin Kadima : Oui et cela fait sept ans que j’essaie de l’organiser. En parallèle, je lutte pour la légalisation du cannabis dans le pays. J’en ai déjà parlé dans certains journaux de Kinshasa mais ça n’a donné aucun résultat. Donc, organiser cette exposition, couplée avec une conférence sur le sujet le 31 octobre, peut faire avancer les choses. En revanche, des foires de ce type existent dans d’autres pays comme l’Allemagne. Dernièrement, j’y ai d’ailleurs rencontré André Noël, de Chanvre Diffusion (France) qui va participer à ma manifestation. Chanvre Diffusion transforme le chanvre dans ses ateliers pour en tirer toutes sortes de produits.
Afrik : Qu’allez-vous montrer aux Congolais ?
Justin Kadima : Tout ce qui est fait à base de chanvre. Des vêtements aux cosmétiques, des textiles aux constructions, jusqu’à la nourriture comme des spaghettis, de l’huile, de la farine, des biscuits et même du chocolat !
Afrik : Y-a-t-il une loi régissant la production et l’utilisation du cannabis en RDC ?
Justin Kadima : La production et la consommation ont été prohibées dès 1923 par la Belgique. Une lettre d’un voyageur allemand datée de 1880 relève que dans la région, un peuple utilisait le chanvre, lors de fêtes mais aussi dans le domaine judiciaire. Ils faisaient fumer les coupables jusqu’à la perte de connaissance… Ce système existait aussi en Afrique du Sud mais avec les colons, tout cela a été interdit. Aujourd’hui, en RDC, on décrie le cannabis et quand je parle de légalisation, on m’accuse de tous les maux. Les Congolais ne comprennent pas mon propos. J’ai essayé de rencontrer le Président Mobutu puis Laurent-Désiré Kabila pour évoquer le problème, sans succès. Le fils Kabila semble plus coopératif.
Afrik : On vous accuse de faire l’apologie de la drogue ?
Justin Kadima : Il faut que les gens comprennent que je ne lutte pas pour les fumeurs mais pour les produits. Je ne suis pas contre les fumeurs car chacun fait ce qu’il veut mais je dis : si le cannabis est légalisé, il n’y aura plus de problème de délinquance juvénile liée à la drogue. Les jeunes seront informés et ne seront plus attirés par l’interdit. Malgré cette méfiance à l’égard du cannabis, je n’ai aucun problème à exprimer mes idées dans les médias congolais.
Afrik : Pourquoi cette motivation à défendre l’utilisation du cannabis ?
Justin Kadima : Je travaille nuit et jour à la promotion de cette plante. Car elle peut aider les hommes. En RDC, le cannabis sauvage est partout. Une partie atterrit dans les poches des fumeurs, le reste est jeté. Résultat : producteurs illégaux et fumeurs sont arrêtés. Il y a des terres qui ne sont pas utilisées et plein de gens au chômage : on pourrait chercher à développer la culture du chanvre pour résorber ces problèmes. Les graines de chanvre se mangent et contiennent beaucoup de protéines, le thé à base de cannabis est également bon pour la santé. Ce sont des choses que l’on pourrait produire chez nous, qui reviendraient moins cher, rapporteraient des bénéfices et créeraient des emplois. En plus, le chanvre connaît quatre récoltes par an, contrairement au coton qui est un plante annuelle.
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