Les infirmières et le médecin bulgares sont arrivés ce mardi matin à Sofia, en Bulgarie, et ont été graciés par le président Guéorgui Parvanov. Après plus de huit ans de détention, les six soignants ont enfin retrouvé leurs proches, grâce à des accords humanitaires et commerciaux conclus entre l’Europe et la Libye.
Leurs proches n’y croyaient pratiquement plus, mais, finalement, le grand jour est arrivé. Les cinq infirmières et le médecin bulgares sont arrivés ce mardi matin à l’aéroport de Sofia, à bord d’un avion présidentiel français. La justice libyenne les avait condamnés à trois reprises pour avoir inoculé le virus du sida à plus de 400 enfants de l’hôpital Benghazi – une accusation qu’ils nient. La dernière peine capitale avait été commuée en prison à vie par la plus haute juridiction du pays. Les soignants devaient donc purger leur peine une fois dans leur pays. Mais, dès leur arrivée, le président Guéorgui Parvanov les a graciés.
48 heures chrono
« Normalement, on ne peut pas le faire. Cela étant, la procédure d’extradition était sortie du cadre juridique pour devenir purement politique. Il n’y avait donc pas de raison de revenir en arrière. Sur le plan technique, c’est une bonne chose puisque c’est favorable aux accusés », explique Antoine Alexiev, l’un des avocats de Kristiana Valtcheva, Nassia Nenova, Valentina Siropoulo, Valia Tcherveniachka, Snejana Dimitrova et du docteur d’origine palestinienne Achraf Joumaa Hajouj. Après plus de huit ans dans les geôles libyennes, ils sont donc tous libres. Un « geste d’humanité de la Libye », ont salué le chef de l’Etat français Nicolas Sarkozy et le président de la commission européenne, José Manuel Barroso, dans un communiqué de la commission européenne et de l’Elysée.
Les dernières 48 heures ont été cruciales dans ce dénouement, pour lequel le Qatar, médiateur dans ce dossier, a joué un rôle important. Il aurait notamment fait un « geste humanitaire » décisif, a laissé entendre Nicolas Sarkozy pendant une conférence de presse, mardi, à l’Elysée. Le secrétaire général de la présidence française, Claude Guéant, la première dame française, Cécilia Sarkozy, et la commissaire européenne aux affaires extérieures, Benita Ferrero-Waldner, s’étaient rendus dimanche en Libye pour négocier l’extradition des personnels de santé. Des négociations tendues qui, jusqu’au dernier moment, ont laissé planer le doute quant à l’issue des pourparlers.
Accords humanitaires et commerciaux
Finalement, la Libye et l’Union européenne ont accordé leurs violons. Tripoli a obtenu des garanties pour la prise en charge des enfants contaminés par le sida et la réfection de l’hôpital de Benghazi. Aussi, le riche pays maghrébin réintégrera au fur et à mesure la communauté internationale à travers des accords de coopération avec l’Europe. Il est entre autres question, d’après la BBC, d’ouvrir le marché des 27 aux produits agricoles et halieutiques libyens.
Nicolas Sarkozy a indiqué qu’un accord franco-libyen éventuel qui aiderait la Libye à acquérir le nucléaire civil n’avait « absolument rien à voir » avec cette affaire. Mais le réseau d’associations français Sortir du Nucléaire souligne dans un communiqué que « promouvoir le nucléaire, et tenter d’étendre cette technologie sur la planète, est de façon générale une très mauvaise chose pour l’environnement », mais que « fournir de la technologie nucléaire à un dictateur est encore plus irresponsable ».
Lors de la conférence de presse à l’Elysée, Nicolas Sarkozy a assuré que « ni l’Europe, ni la France n’a versé une contribution financière à la Libye », « au-delà du protocole d’accord », pour obtenir la libération des infirmières et du médecin. Interrogé par une journaliste sur le fait que Bernard Kouchner, ministre des Affaires Etrangères, n’ait pas été dépêché en Libye, le chef de l’Etat a répondu qu’il avait été associé au dossier mais qu’il en traitait d’autres, comme le Darfour ou le Liban. Et de préciser qu’il pensait que son épouse, « qui ne fera aucune déclaration sur le sujet », « pouvait mener une action utile ». Ce qu’elle a, selon lui, fait avec « humanité » et « brio ». Reste que ce n’est pas sa femme mais Bernard Kouchner qui accompagnera Nicolas Sarkozy, mercredi, en Libye, pour une rencontre politique.
En complément, l’interview de Me Antoine Alexiev
Et l’analyse du rôle de Cécilia Sarkozy