Présentateur de la » radio de la haine » au Rwanda en 1994, le journaliste belge Georges Ruggiu avait incité quotidiennement au meurtre. Il est jugé par le TPIR d’Arusha pour sa complicité avec le génocide.
Georges Ruggiu regrette et supplie qu’on le pardonne. Ce journaliste belge, actuellement jugé par le Tribunal pénal internaitonal pour le Rwanda (TPIR) siégeant à Arusha en Tanzanie, est accusé » d’incitation publique au génocide « et de persécutions, via les ondes de la Radio Télévision Libre des Milles Collines dont il présentait les émissions au printemps et à l’été de 1994 depuis Kigali. L’accusé a plaidé coupable, le parquet a demandé vingt ans de prison et la sentence sera prononcée le 1er juin.
La Radio des Mille Collines, financée à partir de 1993 par des intérêts hutus, a joué un rôle particulièrement odieux dans le déclenchement des haines ethniques et la persécution des Tutsis et des Belges à partir d’avril 1994. Au cours du procès de Ruggiu, le procureur du tribunal, la Suissesse Carla del Ponte, a indiqué que le fait que le repenti était Européen était une circonstance aggravante de sa culpabilité : » Vous vous rendez compte quel impact publicitaire, quel impact de notoriété, le fait qu’un journaliste européen passe les messages qu’on a entendus ? « , a demandé le procureur.
Conscient des chasses à l’homme
Carla del Ponte soutient que Ruggiu était parfaitement conscient de la gravité de ses actes dès 1994. En revanche, les avocats du prévenu mettent en avant le fait qu’il a été » victime d’un matraquage idéologique « et que son amour pour l’Afrique avait été trahi.
En Belgique, beaucoup de témoins présents à l’époque conservent un souvenir horrifié de la haine qui ressortait des émissions de Ruggiu, notamment à l’encontre des Belges. Après l’attentat qui a abattu l’avion de Juvénal Habyarimana et coûté la vie du président hutu, Ruggiu a suggéré que les soldats belges de la Minuar avaient exécuté le complot. Dès le lendemain, dix Casques bleus belges étaient assassinés par l’armée rwandaise. Le génocide débutait au même moment. Le journal Le Soir relate aujourd’hui que Ruggiu a compris dès les premiers jours l’horreur de la situation : au cours de ses sorties à pied dans Kigali, il n’a pas pu ne pas voir les milliers de cadavres jonchant la chaussée, ni les opérations de chasse à l’homme qui se déroulaient dans toute la ville.