Des régimes corrompus et à la solde de puissances occidentales racontés en noir et blanc. Et dans le « Silence ». Le dernier court métrage du cinéaste congolais Amog Lemra est en compétition officielle de la 25e édition du Fespaco (du 26 février au 4 mars 2017).
Un couloir, une longue file d’attente d’un côté, et de l’autre un groupe de personnes qui semblent jouir d’un traitement particulier. De celui que l’on réserve à des futurs dirigeants sous tutelle, à la tête de riches pays, qui «castent» leurs concitoyens : personnel politique, acteurs de la société civile, du monde culturel ou encore intellectuels.
Après La tombe d’un rêve (son premier court métrage) en compétition au Fespaco en 2009, Entre le marteau et l’enclume (son deuxième long métrage) en lice pour l’Etalon de Yennenga en 2015, le cinéaste congolais Amog Lemra est de nouveau en compétition pour la 25e édition de la grand messe du cinéma africain (du 28 février au 4 mars 2017) avec Silence. Le film est l’une des 26 oeuvres sélectionnées dans la catégorie court métrage.
Indicible
Dans une œuvre muette et en noir et blanc, le cinéaste congolais Amog Lemra plonge dans la métaphore pour décrire des régimes rencontrés ça et là sur le continent africain. Dans Silence, les responsables africains sont décrits comme des marionnettes, obéissant au doigt et à l’œil à leurs homologues occidentaux, au détriment de leurs concitoyens. Et en matière de corruption, Amog Lemra souligne que les femmes, bien que rares au pouvoir, jouent jeu égal avec leurs alter ego masculins.
Le président burkinabé Thomas Sankara, son compatriote le journaliste Norbert Zongo et Patrice Lumumba, le père de l’indépendance de l’actuelle République démocratique du Congo (RDC), ont payé le prix du sang pour s’être opposés au système. Ce dernier pourrait être décrit comme une façon de penser les rapports Nord-Sud qui ont, par exemple, été baptisés, «Françafrique» pour ce qui est des relations, souvent malsaines, que Paris entretient avec ses anciennes colonies.
Regards plein d’espoir, ravi, condescendant, inquiet, désespéré, impitoyable… tout se joue sur les visages qu’Amog Lemra filme avec insistance tout au long du court métrage de près de 14 mn. Le malaise est omniprésent. Ici, le silence est définitivement éloquent et traduit le drame qui se joue, souvent dans l’indifférence, depuis des décennies sur le continent africain.
Si le propos est tragique, le réalisateur congolais ne semble pas vouloir pour autant verser dans le désespoir. Amog Lemra a choisi de dépeindre l’indicible en noir et blanc, la couleur du passé… Celle peut-être d’une période qu’il espère, à l’instar de beaucoup d’Africains, à jamais révolue ?
Silence, un film d’Amog Lemra
en compétition dans la catégorie court métrage, Fespaco 2017