La Fédération des organisations féminines de Côte d’Ivoire organisait le 14 juin dernier un séminaire sur la place des femmes dans la société. L’événement a mobilisé plus de 600 auditrices. Les Ivoiriennes revendiquent le droit de faire leur entrée dans l’arène politique. Interview de Mme Youhairt Mobio, leader féministe et charismatique.
Depuis sa fondation il y a deux ans et demi, la Fédération des organisations féminines de Côte d’Ivoire (Fof-ci) réunit 48 ONG de femmes. A sa tête, Mme Youhairt Mobio se démène pour donner aux femmes une plus grande accessibilité aux postes clefs du pouvoir. Le 14 juin dernier, les Ivoiriennes étaient invitées à débattre sur ce thème lors d’un séminaire à Abidjan. Plus de 600 femmes se sont déplacées. Un succès qui reflète, selon Mme Youhairt Mobio, l’évolution de la société ivoirienne. Interview.
Afrik : Qu’est-ce qui s’est dit d’important lors de ce séminaire de la Fof-ci ?
Mme Youhairt Mobio : Nous avons d’abord fait le point sur la place des femmes dans la société ivoirienne. Nous avons relevé les problèmes socio-culturels et socio-économiques qui privent les femmes de l’accès à des postes importants. Il a été décidé de la mise en place d’un comité de suivi, qui permettrait de faire le point sur ces problèmes et de proposer des solutions, en partenariat avec le gouvernement. A terme, ce comité devrait être reçu par les membres du gouvernement et par le chef de l’Etat pour aider à la promotion des femmes.
Afrik : Vous vous prononcez pour la mise en place de quotas en politique. Mais pensez-vous qu’une telle mesure suffirait à résoudre les inégalités socio-économiques et socio-culturelles que vous évoquez ?
Mme Youhairt Mobio : Ca ne suffit pas, bien sûr. Mais actuellement il n’y a dans toute l’arène politique – c’est-à-dire gouvernement et assemblée – que 69 femmes pour 595 postes. A côté d’un système paritaire, nous souhaitons insister sur la scolarisation des femmes et notamment des petites filles pour pallier les inégalités.
Afrik : Avez-vous vu une évolution dans la façon dont les femmes s’impliquaient dans ce combat pour leur reconnaissance ?
Mme Youhairt Mobio : Oui, depuis la création de la Fof-ci, il y a une réelle évolution. Les femmes sortent de plus en plus, elles prennent des risques, manifestent. Les réactions sont parfois violentes. Certaines se sont fait agresser ou même violer. Elles ont peur. Les mentalités vont encore à l’encontre du mouvement pour l’égalité des femmes. Mais en même temps on voit des femmes, et surtout des femmes musulmanes, qui s’impliquent de plus en plus dans ce combat.
Afrik : Vous insistez beaucoup sur la médiatisation de votre mouvement…
Mme Youhairt Mobio : Nous avons fait des spots publicitaires pour prévenir les Ivoiriennes de notre séminaire et beaucoup de femmes détachées de tout cadre associatif sont venues grâce à cela. Nous avons également un projet d’émission sur les droits de la femme sur la première chaîne.
Afrik : Comment êtes-vous perçue depuis que vous vous êtes engagée dans cette action ?
Mme Youhairt Mobio : Comme une femme leader. On commence même à penser à moi pour des postes politiques, mais je veux mettre d’autres femmes en avant. Si j’ai un penchant pour un parti, je préfère le garder de côté pour ne pas influencer le mouvement.