Le Roman de Pauline, de Calixthe Beyala
Pauline, 14 ans, est une banlieusarde, scolarisée mais qui peine à lire. Fille d’une mère que l’assistance sociale est obligée de rappeler à l’ordre et sœur d’un frère délinquant, Fabien, qui traîne souvent à Pantin avec son petit ami Nicolas. Deux petites frappes qui ne doivent leur liberté qu’à leur statut de mineur et aux mensonges de Pauline. La vie de l’adolescente est comparable au désordre qui règne dans la chambre de sa mère où des sacs poubelle font office d’armoire. Cette Pauline-là est une cousine française de Precious, l’héroïne de l’écrivaine américaine Sapphire, auteur de Push, et de Lee Daniels qui a adapté le livre au cinéma. Les abus sexuels et l’obésité en moins. La maman de Pauline, « bien blanche et bien française » se remet difficilement de sa rupture avec son dernier petit ami, Dieudonné, dont elle accuse sa fille d’être à l’origine. Délaissée par sa mère et « orpheline » de père, la «négresse» (elle est métisse), comme l’appelle son petit ami, retrouve avec Mademoiselle Mathilde, son professeur de français, une figure maternelle de substitution qui lui fait découvrir Le livre de ma mère d’Albert Cohen. Auprès de la jeune femme, Pauline se métamorphose. Les dialogues de Calixthe Beyala sont souvent surréalistes – « T’es vraiment positive, toi… Tu serais capable d’investir en Palestine ! T’es tellement optimiste que tu mérites une ovulation…. dit Nicolas à Pauline » – reflètent bien la déstructuration du quotidien de Pauline. Comme toujours, la plume de Beyala est acerbe. Surtout sur la vie dans les banlieues françaises dont la description, selon la narratrice, se résume parfois à une simple caricature. « La politique telle qu’on la perçoit, telle qu’est perçue dans les banlieues, m’ennuie et les problèmes raciaux m’ennuient encore plus, affirme Pauline. Je me demande ce qu’on serait devenus à Pantin (…) si nous n’avions pas la possibilité de ressasser les insultes (…) et les complots dont nous sommes convaincus d’avoir été les dignes victimes. Ils excusent toutes nos faiblesses. […] C’est de la faute de l’esclavage ou de la colonisation. Toute cette bouillie a un responsable, le Blanc (…), mais ce constat ne m’empêche nullement de penser qu’on ne cherche pas à s’en sortir ». Pour Pauline, la vie en a décidé autrement. La lumière semble vouloir s’infiltrer dans sa vie.
Le Roman de Pauline (2008)
Editions Albin Michel, 214 p.