Le film tunisien » Fatma » a reçu le prix de la Confédération internationale des cinémas d’art et d’essai (CICAE), à la » Quinzaine des réalisateurs » du Festival international du film de Cannes, en France. Fatma ou la jeunesse violée. Interview du réalisateur Khaled Ghorbal.
L’Afrique a sauvé l’honneur. Bien que timidement représentée au Festival de Cannes, elle repart avec un prix. » Fatma « , le long métrage du Tunisien Khaled Ghorbal a reçu le prix de la Confédération internationale des cinémas d’art et d’essai, présenté à la » Quinzaine des réalisateurs « . » Fatma » a concouru avec vingt autres longs métrages, douze courts ou moyens et trois films expérimentaux.
Le réalisateur Khaled Ghorbal s’est inspiré de faits réels pour tourner son premier long, en Tunisie. Le scénario retrace dix années de la vie de Fatma, adolescente de 17 ans. Violée par son cousin, Fatma ne va pas pour autant se résigner et se taire. Elle va avancer à sa mesure tout en construisant sa personnalité dans des espaces et des environnement différents.
Afrik : Pourquoi avez-vous choisi de filmer le portait d’une jeune femme ?
Khaled Ghorbal : La Tunisie, le pays de mon enfance et de ma jeunesse, est bourrée de contradictions entre la réalité et les lois, dans son histoire même, dans les relations entre les personnes, dans l’individu. Cet aspect m’a toujours frappé. La Tunisie est un pays moderne mais j’ai appris que les jeunes femmes avant leur mariage vivent une sexualité. Cette révélation n’est pas choquante en elle-même. Ce qui est choquant, c’est que les filles se font recoudre l’hymen pour paraître vierge avant le mariage. Cela montre toute l’hypocrisie de cette société. C’est pourquoi il m’est venu l’envie de raconter l’itinéraire d’une de ces jeunes filles. Pour moi, cette histoire s’est imposée en image.
Afrik : Quelle satisfaction en retirez-vous ?
Khaled Ghorbal : Ma seule ambition est que mon travail puisse rencontrer le public et que mon film puisse être vu. La question de la diffusion reste en suspens mais le prix obtenu forme un tremplin extraordinaire. Cette récompense est une sorte de caution. J’ai reçu un prix à Cannes, de réputation internationale, alors que demande le peuple ! Je n’ai pas de souci à me faire, le distributeur MK2 me garantit la diffusion du film, dans des conditions optimales. Sa sortie est prévue dans les salles en novembre ou janvier prochain, en France.
Afrik : Est-ce que les acteurs tunisiens étaient présents à Cannes ?
Khaled Ghorbal : L’actrice principale, Awatef Jendoubi, est venue, en renfort, à mes côtés avec mon producteur. Nous étions ensemble lors des projections du film.
Afrik : Quelle est votre expérience dans le domaine du cinéma ?
Khaled Ghorbal : Formé au théâtre, je me suis destiné à la profession de scénariste et de réalisateur au cinéma. C’était un désir profond. A l’âge de 51 ans, j’ai débuté ma carrière en 1996 avec le court métrage » El Mokhtar » dont le thème principal est l’abomination de l’intégrisme et la manipulation des jeunes. Je me suis déjà attaqué à un documentaire sur la Tunisie. Une partie de ce pays est toujours en moi, je ne peut m’en détacher totalement. J’ai quitté la Tunisie, il y a trente ans pour étudier.
Afrik : Est-ce que vous retournerez à votre première vocation ?
Khaled Ghorbal : J’y reviendrai plus tard, pour l’instant je n’ai pas le temps. La réalisation d’un film est trop prenante.