Faire face à la malnutrition au Mali


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Dr. Fatoumata Kouyaté

Les taux de malnutrition des enfants du Mali dépassent les seuils fixés par l’Organisation mondiale de la santé. Comment lutter ? Reportage à Kati, dans un Centre de santé communautaire.

« Vous voyez cet enfant ? Il est complètement apathique. Il a deux ans, mais il est tellement faible qu’il ne sait même pas marcher. J’étais dans un village lors d’une tournée d’inspection hier. Je l’ai entendu crier très fort et c’est comme ça que j’ai vu qu’il avait tous les signes de la malnutrition : il avait 39,5° de fièvre, il toussait. C’est un cas sévère. J’ai obligé sa mère a venir au centre pour qu’il reçoive des soins. S’il n’avait pas crié, il aurait été condamné. » Une histoire comme celle-ci, le docteur Fatoumata Diarra Kouyaté en a des dizaines à raconter. Depuis cinq ans qu’elle travaille au Centre de santé communautaire de Kati, près de Bamako, elle a vu défiler des enfants dans des états pitoyables et des mères désemparées.

A l’image du Mali, où un enfant meurt toutes les 5 minutes, les petits de la région de Kati paient un lourd tribut à la malnutrition. La première cause ? « Le sevrage brusque des enfants à cause des grossesses rapprochées », répond le docteur sans hésiter. « Non seulement, l’enfant est sevré du jour au lendemain mais il est souvent séparé de sa mère et confié à une autre personne de la famille. C’est un double sevrage ! » Autre problème : « Les gens attendent toujours le moment critique avant de faire hospitaliser l’enfant. Et peu savent qu’avec la malnutrition, tout se joue avant deux ans. Le petit que j’ai ramené hier va garder des séquelles toute sa vie. Sa croissance, physique et intellectuelle, sera moindre, il n’ira probablement pas à l’école. Adulte, il sera à la charge de la société. »

Convaincre les populations

Il y a aussi les carences en micronutriments (minéraux et vitamines). Sur ce volet, l’équipe de Fatoumata Diarra Kouyaté organise des sessions « cuisine ». Au menu aujourd’hui : semoule de sorgho, tomates, oignons, poisson et sauce arachide. « C’est un plat que les gens avaient l’habitude de manger ici mais qu’ils ont peu à peu abandonné. On le remet au goût du jour. On explique le rôle de chaque aliment. C’est une façon d’expliquer beaucoup de choses aux mamans. On les aide à mettre en pratique des recettes enrichies chez elles, avec leurs moyens. On encourage la consommation d’aliments locaux tombés en désuétude, comme le datou, ce sont les grains d’un arbre, très richee en protéines. » Pour ces réunions hebdomadaires, ce sont les femmes qui cotisent. Elles sont une cinquantaine à ne manquer ce rendez-vous sous aucun prétexte. Et le lundi, c’est bouillie !

« Jusqu’ici, la nutrition était négligée », explique Fatoumata Diarra Kouyaté. « Mais depuis que le Protocole national a vu le jour en 2008, des agents ont été formés et, à présent, il y a beaucoup plus de dépistage et de prise en charge. Nous organisons par exemple un dépistage par mois dans les 42 villages du district. Les choses avancent, l’information circule, les chefs de village comprennent les problèmes. L’important, c’est de se mettre au niveau des populations pour qu’elles aient confiance. » Le nombre d’enfants en cas de malnutrition aigüe dépend des saisons. Le docteur s’inquiète : « Nous allons en recevoir de plus en plus car nous entrons dans la période de soudure. On va passer de 3 à 10 enfants par semaine ».

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