Le général Gnassingbé Eyadéma a mis fin au faux suspense de sa candidature à la présidence du Togo. Au pouvoir depuis 36 ans, il brigue un troisième mandat à la tête du pays. A la clôture des inscriptions, jeudi dernier, huit dossiers ont été retenus par la commission électorale. La liste finale des prétendants au scrutin du 1er juin n’a pas encore été publiée. Mais les dés sont d’ores et déjà jetés.
En collaboration avec Le Togolais.
Le général Gnassingbé Eyadéma aura attendu le dernier jour de la clôture des inscriptions, jeudi, pour présenter sa candidature à la présidence du Togo. L’actuel chef de l’Etat, désigné la semaine dernière par son parti, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), comme candidat officiel, a décidé de se présenter pour un troisième mandat. Il sera opposé le 1er juin prochain à sept challengers qui tenteront de mettre fin à 36 ans d’un règne sans partage. Nul ne connaît encore la liste des prétendants qui doit être rendue publique par la Cour constitutionnelle après examen de la Commission électorale nationale indépendante togolaise (Céni).
Au pouvoir depuis 1967, Gnassingbé Eyadéma est le plus vieux dirigeant africain en exercice. Contrairement à ses engagements, pris en juillet 1999 dans le cadre des Accords de Lomé, de ne pas se représenter, le général fait fi de sa promesse qu’il avait réitérée en juillet 2001, devant le président français Jacques Chirac. Celui qui n’a pas » l’intention de laisser s’installer la chienlit » dans le pays a fait annoncer sa candidature par son premier ministre Koffi Sama (également secrétaire général du RPT). » Je suis heureux de vous annoncer que le président de la République Gnassingbé Eyadéma a accédé aux requêtes des militants du RPT, de se sacrifier une fois encore « , a déclaré jeudi le chef du gouvernement.
Gilchrist Olympio ?
Nul ne sait si la candidature, annoncée le 28 mars dernier à Paris, du principal opposant à Eyadema, Gilchrist Olympio -fils de l’ancien président Sylvanus Olympio assassiné en 1963- a été effectivement acceptée par la Céni. Mais avec les aménagements de la nouvelle Constitution de décembre 2002, le leader de l’Union des forces du changement (UDF) est théoriquement exclu de la course à la présidence. La Constitution stipule en effet que seuls les personnes ayant séjourné au moins douze mois au Togo avant le scrutin peuvent présenter une candidature aux présidentielles. Gilchrist Olympio vit en exil en France depuis 1999.
C’est en ordre dispersé que l’opposition se présentera le 1er juin prochain aux élections. Regroupée au sein de la Coalition des forces démocratiques (la CFD), qui comportait huit partis (Gilchrist Olympio en était le chef de file, il a claqué la porte au bout de 48 heures), l’opposition était censé désigner un candidat unique pour affronter Eyadema aux urnes. Sans succès. Chacun tentera donc sa chance individuellement.
Jouer le jeu d’Eyadéma
En l’absence probable de Gilchrist Olympio, le plus sérieux concurrent de l’actuel chef de l’Etat semble être Yaowi Agboyibor du Comité d’Action pour le Renouveau (Car) qui a annoncé sa candidature le 23 avril dernier. Dahuku Péré, ancien président de l’Assemblée nationale, membre du RPT pendant près de 20 ans et exclu de ce dernier il y 6 mois, s’est également lancé mardi dernier dans la course présidentielle sous l’étiquette des Rénovateurs. Un parti aux allures de RPT bis. Dans le quatuor de tête de l’opposition, Eden Kodjo n’a pas manqué lui aussi de poser sa candidature. L’ancien Premier ministre et ancien secrétaire général de l’Organisation de l’Unité Africaine, se présente au nom de son parti la Convergence Patriotique Panafricaine (CPP). Dernier ténor de feu la CFD, Léopold Gnininvi, de la Convention démocratique des peuples africains (CDPA), devrait lui aussi être de la partie.
La multiplicité des candidats fait assurément le jeu d’Eyadéma qui doit sans doute se frotter les mains devant la cacophonie de l’opposition togolaise. Car le nouveau mode de scrutin imposé par la nouvelle Constitution, des élections à un tour, lui est assurément favorable. Mais de multiples sources d’inquiétudes quant à ces élections demeurent. Gilchrist Olympio, à mots à peine voilés, appelait la population, avant même sa candidature, à prendre les armes pour se débarrasser d’Eyadéma. Et sa stratégie de révolte risque de se radicaliser s’il est exclu du scrutin.
Des élections sans observateurs
En refusant la présence d’observateurs européens et américains pour les élections du mois prochain, Eyadéma hypothèque la crédibilité du vote. Craintes redoublées quand on entend le général féliciter son homologue Olusegun Obansanjo pour sa brillante réélection à la tête du Nigeria, alors que la communauté internationale crie unanimement au simulacre démocratique. Mais celui qui a eu l’audace d’organiser une conférence sur la transparence électorale à Lomé n’est peut être plus à ça près.