L’Algérie compte aujourd’hui 18 191 travailleurs étrangers contre 543 en 1999, a annoncé dimanche le ministre de l’Emploi et de la Solidarité nationale, Djamel Ould-Abbès. Ces immigrés économiques, principalement d’origine chinoise, sont présents dans les secteurs de l’habitat et de l’hydrocarbure et sont majoritairement concentrés à Alger.
Par Vitraulle Mboungou
« Le nombre de travailleurs étrangers, qui était de 543 en 1999, a atteint aujourd’hui les 18 191 », a déclaré, dimanche, Djamel Ould-Abbes, ministre algérien de l’Emploi et de la Solidarité nationale à la journée d’information sur la gestion de la main d’œuvre. « L’Algérie connaît aujourd’hui une croissance économique remarquable, qui est appelée à se consolider… Ce développement nécessite une main-d’œuvre étrangère afin de bénéficier de l’expérience et de la productivité acquises au niveau internationale », a-t-il poursuivi. Il a signalé que la croissance, négative avant 1998, a augmenté en 2003, atteignant ainsi 6,8%, grâce notamment au retour de la paix et de la sécurité dans le pays et à l’augmentation du prix du pétrole. Il a, par ailleurs, expliqué que la stratégie du ministère est de « mobiliser les ressources humaines au niveau international pour les besoins de l’économie algérienne », tout en écartant le moindre recours à une migration sélective.
Les Chinois représentent 45% du chiffre global
Les Chinois représentent la communauté étrangère la plus importante avec 45% du chiffre global, suivis des Egyptiens (11%), des Italiens, des Philippins, des Américains et des Français, avec 3% par nationalité. 65% de cette main d’œuvre, dont le plus gros des effectifs travaille dans le secteur de l’habitat et de l’hydrocarbure, sont concentrés à Alger. Beaucoup de ces travailleurs, les Chinois en particulier, ont accompagné leurs entreprises installées sur le territoire algérien. Il s’agit de sociétés de travaux publics engagées dans des chantiers de construction depuis au moins cinq ans. Ainsi, le pays compte une vingtaine de groupes chinois de BTP, dont le géant public China State Construction & Engineering Corporation (CSCEC). Le secteur est effectivement très demandeur depuis l’annonce du programme présidentiel visant à construire un million de logements d’ici 2009. Comment sont perçus ces immigrés chinois par les Algériens ?
La « déferlante invasion » chinoise, comme l’appelle la presse locale, suscite un sentiment de « sinophobie » dans la société algérienne qui ne comprend pas que l’on fasse appel à des étrangers alors que le pays connaît un taux de chômage avoisinant les 30%. Interrogé sur le risque que représente cette main d’œuvre pour la cohésion, un représentant du ministère de l’Intérieur, joint au téléphone, a répondu qu’il « n’existait aucun litige entre eux », que les Chinois s’étaient « parfaitement intégrés à la société algérienne, allant même jusqu’à se marier avec les natives du pays ». Selon le ministre de l’Emploi et de la Solidarité nationale : « l’Algérie ne fait appel qu’aux qualifications considérées insuffisantes sur son sol, telles que les métiers du bâtiment ». Sur les conditions de travail de ces étrangers, Djamel Ould-Abbes a fait remarquer que ces derniers bénéficient des mêmes avantages que les nationaux, tant en matière de relations de travail, de droit syndical ou de sécurité sociale. Mais pas tant que cela si l’on tient compte des nombreux incidents provoqués par les travailleurs chinois protestant contre le non versement des salaires ou leurs conditions d’hébergement déplorables. Il s’agirait, selon le représentant du ministère de l’Intérieur, « d’incidents isolés faisant parti du passé, qui de plus concernaient les Chinois et leur employeur ».
Des milliers de clandestins
Malgré les chiffres annoncés par le ministre Djamel Ould-Abbes sur l’immigration légale, il n’en reste pas moins que l’immigration clandestine connaît également un véritable essor. Beaucoup d’étrangers, venant notamment d’Afrique subsaharienne, travaillent dans le secteur informel. Il s’agit généralement d’immigrés qui n’ont pas réussi à se rendre vers l’Europe et qui se retrouvent coincés dans ce pays, en situation irrégulière, obligés de travailler « au noir ». Ils sont présents sur tout le territoire, au nord comme au sud, sur les chantiers de construction, dans les champs… travaillant dans des conditions relativement difficiles pour des salaires extrêmement faibles. Même si le nombre reste indéfini par manque de statistiques, cette autre main d’œuvre étrangère constitue une communauté tout aussi importante qui pourrait se compter par milliers.