» Oups ! pardon « . Le mot est vite prononcé lorsque par accident, il advient que nous bousculions une personne dans la rue, que nous interrompions un délicieux entretien entre deux coeurs à prendre ou que, passant outre les civilités les plus élémentaires, nous nous restaurions avec avidité devant des convives qui n’ont pas été servis.
A lire les dernières déclarations du président Blaise Compaoré, qui un mois après avoir demandé officiellement pardon, le 30 mars, pour les crimes d’Etat commis depuis l’indépendance, se dit » tranquille » avec sa conscience, nous avons le sentiment que le chef d’Etat s’est livré à quelques-unes de ces petites rustreries inoffensives qui émaillent notre quotidien. Prononcée en présence des dignitaires religieux et chefs traditionnels, cette repentance se voulait aussi » sincère » que possible. Or, les opposants à l’actuel président, qui demandent depuis deux ans que l’assassinat du journaliste Norbert Zongo dans lequel est impliqué le frère du chef de l’Etat suive son cours, restent inflexibles : c’est niet. Pas de pardon. Comme les victimes algériennes de l’armée coloniale française ou des opposants à Pinochet, se seraient-ils égarés dans des combats d’arrière-garde, ces fâcheux ? Allons soyez raisonnables. Pouce ! On oublie tout. On fait la paix. Et si vous persistez à faire la mauvaise tête, vous êtes de tristes sires. Des mauvais coucheurs.
Seulement, voilà, ce que les opposants à Compaoré demandent depuis des années, c’est que justice soit faite. A charge pour les familles des victimes d’accorder le pardon, ou non. Le pardon est un long et intime processus. Il implique que les auteurs des crimes ne le forcent pas. Il vient après identification et jugement des coupables. Sinon le pardon, c’est Ponce Pilate… le savon en moins. Les mains sont toujours sales.