Le Mozambique a été secoué par une évasion massive qui a défiguré la prison centrale de Machava, à une quinzaine de kilomètres de Maputo, la capitale. Plus de 1 500 détenus se sont échappés dans des circonstances dramatiques. Bien que les détails exacts de l’incident restent flous, les autorités ont confirmé l’évasion à la fin de l’après-midi, alors que la situation politique du pays était déjà tendue. Depuis la confirmation de l’élection de Daniel Chapo à la Présidence, le 23 décembre, de violentes manifestations secouaient le pays, exacerbé par des affrontements liés aux résultats électoraux.
Bernardino Rafael, le chef de la police du Mozambique, a révélé que 1 534 détenus s’étaient échappés de cette prison de haute sécurité. Des vidéos qui ont circulé sur les réseaux sociaux montrent une foule d’évadés se précipitant hors du bâtiment et se dispersant dans les rues avoisinantes, au milieu de nombreux coups de feu. Certains prisonniers ont même pris les armes des gardiens dans leur fuite. Alors que 150 fugitifs ont été récupérés, le bilan des affrontements avec les forces de l’ordre fait état de 33 morts et 15 blessés, des chiffres qui devraient encore évoluer.
Des djihadistes parmi les fugitifs
Selon les autorités, l’évasion a été facilitée par la confusion provoquée par les manifestations organisées à proximité du pénitencier. Les manifestants, qui protestaient contre les résultats électoraux, auraient permis aux détenus de faire tomber un mur de l’enceinte de la prison, facilitant ainsi leur fuite. Ce phénomène d’évasion survient dans un contexte particulièrement fragile, marqué par les tensions liées à la victoire de Daniel Chapo, qui a remporté 65% des voix à l’élection présidentielle. Cette évasion massive soulève des préoccupations non seulement sur l’ampleur du chaos, mais aussi sur les profils des évadés.
En effet, parmi les fugitifs, il y aurait des membres de groupes djihadistes opérant dans la région de Cabo Delgado, une province du nord du Mozambique en proie à des violences depuis plusieurs années. Ces groupes, responsables de nombreuses attaques meurtrières, incluent certains des prisonniers qui se sont échappés. Le chef de la police a exprimé sa profonde inquiétude, notamment à propos de la présence d’un détenu particulièrement dangereux parmi les évadés. Non sans souligner les risques pour la sécurité nationale. Cette évasion intervient alors que le Mozambique est plongé dans une grave crise post-électorale.
La surprenante réaction de l’Afrique du Sud
Depuis l’annonce des résultats par le Conseil constitutionnel, de nouvelles violences ont éclaté dans le pays. Selon l’ONG Plataforma Decide, au moins 248 personnes ont perdu la vie en 65 jours de violences, résultat direct de l’instabilité politique qui a suivi les élections. Les manifestants protestent contre ce qu’ils considèrent comme un scrutin truqué, et la tension est montée d’un cran à la suite de l’officialisation de la victoire de Chapo. Les critiques ont été vives à l’international, notamment de la part des États-Unis, qui ont exprimé leurs préoccupations face au manque de transparence des élections, contrastant avec la réaction de l’Afrique du Sud.
En effet, quelques heures après la ratification des résultats, le secrétaire général du Congrès national africain (ANC), parti au pouvoir en Afrique du Sud, a félicité Daniel Chapo, saluant son élection. Cette prise de position a été largement critiquée, notamment par les observateurs locaux, qui y ont vu une forme de nonchalance face à la situation. L’Afrique du Sud, ainsi que d’autres régimes de la région, comme la Zanu PF au Zimbabwe ou le MPLA en Angola, redoutent un changement de dynamique politique au Mozambique, qui pourrait inspirer les oppositions dans leurs propres pays.
Les évasions massives en Afrique : un phénomène récurrent
Les évasions massives de prison sont malheureusement un phénomène récurrent dans plusieurs pays d’Afrique, souvent liées à des contextes de violences et d’instabilité politique. En 2018, au Liberia, plus de 100 détenus s’étaient échappés d’une prison de haute sécurité à Monrovia, profitant de conditions chaotiques après des affrontements violents entre prisonniers et gardiens. De même, en 2020, au Cameroun, des centaines de détenus se sont échappés de la prison de Kondengui à Yaoundé, dans un contexte de guerre civile et de tensions politiques internes. Ces événements rappellent la fragilité de certains systèmes pénitentiaires en Afrique, exacerbée par des crises politiques et sociales.
L’évasion massive au Mozambique, dans un contexte aussi troublé, souligne non seulement les failles sécuritaires du pays, mais aussi la profonde instabilité qui le secoue. Cette situation pose la question de la gestion de l’après-élection dans un pays où la violence semble s’intensifier, menaçant de plonger le Mozambique dans une période de plus grande incertitude.