Nouvelle évacuation Avenue de Flandre. Au moins 2 100 réfugiés, la plupart originaires du Soudan et de l’Afghanistan, qui dormaient à même le sol, en attendant d’être logés, ont été évacués ce vendredi matin Avenue de Flandre, dans le 19ème arrondissement de Paris.
L’opération débute un peu avant 6h00 du matin, ce vendredi 16 septembre 2016. Au moins une centaine de CRS et de gendarmes encerclent l’Avenue de Flandre, dans le 19ème arrondissement de Paris, pour évacuer les plus de 2000 réfugiés qui dormaient à même le sol, sur des cartons ou matelas, en attendant d’être pris en charge par les pouvoirs publics. Les réfugiés pour la plupart originaires du Soudan et d’Afghanistan attendent tous dans une longue file de monter dans les bus qui se succèdent. De nombreux soutiens, dont Nikita, Christine, Agathe, Catherine, Marine sont présents pour leur prêter main forte et les rassurer. Des éléments de la préfecture mais également de la mairie assistent aussi au déroulement de l’opération.
Vers 10h, les réfugiés sont encore nombreux à attendre de monter dans les bus. Sans compter qu’une forte pluie ne tarde pas à s’inviter alors même que certains sont assis à même le sol, d’autres debouts, d’autres couchés encore sur des bouts de cartons. D’autres le regard hagard ne peuvent s’empêcher de fumer une ou deux cigarettes. « Il faudrait que l’évacuation soit plus fluide et plus rapide car les réfugiés sont fatigués d’attendre comme ça sous la pluie. C’est inhumain je trouve !», déplore Agathe.
Selon les informations qui filtrent au compte goutte par-ci par-là, ils devraient être logés pour la plupart en Ile de France, dans des hôtels, des gymnases ou encore des centres d’hébergement. « Mais le problème c’est qu’avec les évacuations on n’est jamais sûre que tous les réfugiés soient logés car il en reste à chaque fois sur le carreau. Une chose est sûre, l’Avenue de Flandre grouillera à nouveau de réfugiés d’ici quelques heures », affirment les soutiens. Ces derniers viennent de s’apercevoir d’ailleurs que cinq jeunes, qui viennent d’arriver, leur font signe de loin, leur expliquant qu’ils souhaiteraient aussi monter dans un bus pour espérer avoir un logement. Les soutiens négocient comme ils peuvent avec les responsables de l’opération pour que la requête des jeunes hommes soit acceptée. Mais rien à faire. Le refus est catégorique. « Je suis désolé mesdames mais j’ai des ordres moi ! On ne peut pas les prendre, ils viennent tout juste d’arriver et n’étaient pas avec les autres réfugiés », rouspète ce responsable des CRS à la carrure imposante. « Monsieur je vous assure qu’on les connait ces jeunes, on leur donne tous les jours à manger, à boire, ils sont quotidiennement au camp avec nous », tente Christine à nouveau de convaincre ce responsable de la Préfecture. La réponse est encore négative. « Non c’est impossible, il n’y a plus de place pour les hébergements !», rétorque-t-il. « Mais comment ça il n’y a plus de place ? Il y a plein de bus vides là!», fustige, pour sa part, Catherine.
L’opération se termine finalement un peu avant 13h00. Mais il reste encore sur l’Avenue de nombreux réfugiés, notamment quelques femmes, des enfants, des mineurs, et beaucoup d’hommes, qui n’ont pas été autorisés à monter dans les bus pour espérer être logés. Déçus, certains accompagnés de quelques soutiens se mettent déjà à récupérer tout ce qu’ils peuvent sur l’Avenue : draps, couvertures, bâches… avant que le service de la propreté de la ville de Paris ne passe pour tout ramasser et mettre dans les ordures.
« Je n’ose plus passer Avenue de Flandre tellement ça sent mauvais !»
L’Avenue de Flandre, transformé en camp, ne ressemble en effet plus qu’à une décharge publique. Des vêtements, des sacs remplis d’affaires, des pulls, des matelas, des tentes… tout y est. De nombreux passants, riverains et touristes s’arrêtent régulièrement pour contempler le spectacle surréaliste, au cœur de Paris. « L’Avenue était propre avant ! Comment ils peuvent laisser les gens dormir dans de telles conditions ! C’est honteux ! Ils peuvent attraper des microbes, des maladies », s’indigne cette femme très âgée, habitante du quartier, qui marche difficilement à l’aide d’une canne. « Je n’ose vous savez même plus me promener sur l’Avenue tellement ça sent très mauvais. Il faut dire que la mairie n’a installé aucun dispositif pour qu’ils puissent faire leurs besoins. Et la vue de tout cela me désole, vraiment je ne peux pas voir ça. C’est déplorable que le gouvernement ne fasse rien ! Ces gens me font de la peine, ils ont quitté leur pays à cause de la guerre. Ils ne méritent pas d’être traités comme ça », renchérit-elle.
Les discussions sur la situation et l’état de l’Avenue vont en effet bon train. Chaque passant ou riverain y va de son commentaire. Tous soulignent et pointent du doigt un « spectacle désolant ». D’autres qui ne sont pas au courant des faits se demandent ce qui a bien pu se passer. C’est le cas de ce couple de touriste, originaire de la Roumanie. « On ne pensait pas que cela pouvait exister ici. La France ne ressemble en réalité pas du tout aux images de la télé. C’est vraiment triste et choquant !», affirme le couple, qui semble sonné.
Pendant ce temps, de nombreux réfugiés, errant encore sur l’Avenue, usés par les affres de l’exil, se demandent ce qu’ils vont devenir. Ils savent qu’une fois de plus le service de propreté nettoiera toute l’Avenue comme si de rien n’était. Comme si le camp n’a jamais existé. Seulement, il se reformera à nouveau dès leur départ. Un perpétuel recommencement… « On se demande jusqu’à quand cette situation va durer ?», se questionnent les soutiens.