Dépassé par l’avancée fulgurante des rebelles tigréens depuis leur contre-offensive spectaculaire lancée en juin dernier, Abiy Ahmed a sonné une mobilisation générale, et est même descendu personnellement sur le terrain des opérations. Mais, cela sera-t-il suffisant pour inverser le cours des événements qui, depuis plusieurs semaines, a tourné à l’avantage des Tigréens ?
Vendredi dernier, une vidéo montrant le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, au front, en tenue de camouflage, a été diffusée. Le chef de l’exécutif éthiopien promettait alors une victoire totale à ses troupes. Evoquant le moral des forces de défense, le Premier ministre indiquait qu’il était excellent et que même Kasagita avait été pris. Abiy Ahmed, qui promettait de grands succès aux troupes fédérales, avait décidé, en plus de prendre Chifra et Burqa, de poursuivre l’offensive jusqu’à l’obtention de la liberté de l’Éthiopie.
Cinq jours après ces déclarations, il sied de se demander où en sont les forces fédérales dans la marche vers cette victoire promise par le Premier ministre. La prise de Kasagita est-elle effective ? Chifra et Burqa sont-elles tombées aux mains des forces fédérales comme annoncé ? Difficile de répondre à ces questions par l’affirmative, la vérification de l’information par des sources indépendantes étant carrément impossible, depuis le début de la guerre au Tigré, en novembre 2020.
Mais, tout porte à croire que les rebelles continuent d’avancer vers Addis-Abeba dont ils ne seraient séparés que par environ 180 km, selon le journal Ouest-France. La mobilisation générale lancée par Abiy Ahmed, sa propre descente sur le terrain, risquent-elles alors d’être sans grand effet face à la puissance de feu des Tigréens soutenus par l’Armée de libération oromo (OLA) ? Pour Patrick Ferras, docteur en géopolitique et président de l’association Stratégies africaines, la réponse est évidente.
« Il y a peu de chances que cette mobilisation générale inverse le cours des combats actuels. L’armée fédérale recule depuis juin et les Tigréens ont progressé de plus de 500 km, en cinq mois. L’apport de jeunes non formés ne fera pas évoluer la situation. Tout au plus, des ralentissements de l’avancée des TDF -les forces de défense du Tigré- sont possibles, car les dernières forces de l’armée éthiopienne vont être engagées. Les combats risquent d’être très meurtriers », a confié M. Ferras à Ouest-France.
Une chose est certaine : c’est que la guerre entre les troupes tigréennes et les forces gouvernementales éthiopiennes est loin d’être terminée, même si les prochains jours seront sans doute révélateurs de l’allure finale du conflit.