Cinquante ans après la chute de l’empire éthiopien, le souvenir du Derg et de sa dictature sanglante hante encore les mémoires d’une nation marquée par la répression.
Il y a un demi-siècle, le 12 septembre 1974, l’empereur Hailé Sélassié Ier, surnommé le « Roi des rois », fut renversé, marquant la fin de l’une des plus anciennes monarchies du monde. Ce coup d’État militaire, salué par une partie de la population éthiopienne, a donné naissance à un régime dictatorial connu sous le nom de Derg. Mais aujourd’hui, la douleur et la rétrospection teintent les souvenirs de cette époque. Si la révolution promettait un avenir meilleur, la réalité s’est avérée bien différente pour des millions d’Éthiopiens.
La chute de l’empire et la montée du Derg
Les militaires ne réalisèrent pas simplement un coup de force en renversant Hailé Sélassié en 1974. Il était le point culminant d’un mécontentement généralisé envers un système féodal jugé archaïque. Les grèves, manifestations et l’élan populaire enchaînés laissèrent place à la prise de pouvoir par les militaires marxistes du Derg, dirigés par le colonel Mengistu Haile Mariam. Mais si la monarchie avait ses critiques, le régime qui remplaça la monarchie plongea rapidement le pays dans un cycle de terreur et de répression.
Les étudiants de l’Université d’Addis-Abeba, acteurs clés du mouvement révolutionnaire, espéraient un changement radical vers une société plus juste. La dure réalité du Derg, un régime indifférent à la démocratie ou aux libertés individuelles, fit rapidement obstacle à leur rêve d’égalité sociale et de réforme agraire. Au lieu d’une Éthiopie libérée, le pays s’est retrouvé pris au piège d’une dictature brutale, caractérisée par des purges sanglantes et des exécutions de masse.
L’époque sombre de la terreur du Derg
La campagne de répression du Derg, connue sous le nom de « Terreur rouge », est tristement célèbre. Les arrestations arbitraires, tortures et massacres de cette période laissèrent des cicatrices profondes dans la mémoire collective du pays. Le régime impitoyable élimina les opposants politiques sans pitié et causa la perte de milliers de vies éthiopiennes. Cinquante ans plus tard, les mémoires des survivants et des générations suivantes gravent encore ces événements.
Un héritage controversé, un empire réhabilité ?
Avec le recul, la figure de Hailé Sélassié est aujourd’hui réévaluée. Si son règne autocratique a contribué à son renversement, de nombreux Éthiopiens commencent à voir en lui une figure symbolique de l’unité nationale. Le gouvernement éthiopien actuel rend hommage à l’empereur. Cependant, la plupart des Éthiopiens perçoivent le Derg comme une période noire de l’histoire du pays. Les anciens partisans du mouvement révolutionnaire continuent de questionner le sens de leur lutte et les dérives du régime qu’ils ont, malgré eux, contribué à installer.