Pour conserver l’intégrité totale de son territoire, le Maroc semble prêt à tout. Dopé par le « deal de Trump » autour du Sahara Occidental, le royaume chérifien s’offre le luxe de défier désormais Madrid et Berlin, dans l’espoir de faire évoluer la position de l’Union Européenne (UE). Le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, est sur tous les fronts, afin de faire entendre la voix de Rabat dans le monde, sur le dossier du Sahara Occidental.
Dans une bataille diplomatique sans précédent, à travers son ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, le royaume chérifien veut recouvrer l’intégrité totale de son territoire, notamment le Sahara Occidental, qu’il revendique depuis presque 45 ans. Une éternité pour les autorités marocaines et surtout avec la progression du terrorisme dans le Sahel. Ainsi, le Maroc cherche désormais à projeter à l’extérieur l’image d’une assurance diplomatique décomplexée et s’offre même le luxe de braver deux Etats européens : l’Espagne et l’Allemagne.
« Berlin a multiplié les actes hostiles et les actions attentatoires à l’égard des intérêts supérieurs du Royaume du Maroc. Ainsi, l’Allemagne s’est démarquée par une attitude négative sur la question du Sahara marocain », selon Rabat, qui a décidé de rappeler son Ambassadeur, le 6 mai dernier.
La double brouille avec l’Espagne et l’Allemagne est assumée, orchestrée même, qui illustre une fierté nationale pour un Maroc dopé par les récentes percées sur le dossier du Sahara Occidental tout autant que l’inquiétude que ces acquis butent sur des limites. Autant l’épreuve de force avec Madrid s’inscrit dans une relation déjà tourmentée, proximité géographique oblige, autant la crise avec Berlin est inédite et donc hautement révélatrice des nouvelles postures de Rabat.
Le conflit avec l’Espagne est directement lié à la question du Sahara Occidental, source de mésentente récurrente entre les deux pays voisins. Pour la petite histoire, le 25 avril, le Maroc a fait connaître à l’Espagne son « exaspération » à la suite de l’hospitalisation dans un établissement près de Saragosse, une semaine plus tôt, de Brahim Ghali, le secrétaire général du Front Polisario, le mouvement indépendantiste sahraoui en lutte contre « l’occupation marocaine ».
Selon le quotidien espagnol El Pais, Madrid aurait accédé à une requête d’Alger, directement formulée par le ministre algérien des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, demandant un accueil sur le sol espagnol pour traitement médical du dirigeant sahraoui, en « danger de mort » après avoir été contaminé par le Covid-19. Brahim Ghali est visé par des plaintes, y compris en Espagne pour « viol, torture et violations massives de droits humains ».
Le ministère marocain des Affaires étrangères, a qualifié, le 8 mai dernier, la décision espagnole d’« acte grave et contraire à l’esprit de partenariat et de bon voisinage ». Le Maroc « en tirera toutes les conséquences », ajoute Rabat, qui enjoint Madrid à ne pas « minimiser l’impact » de l’incident, invoquant notamment la « sauvegarde des intérêts stratégiques des deux pays ».