Le chanteur camerounais Erik Aliana, qui jouit aussi d’une grande notoriété au Japon, revient sur scène avec son troisième album « Just my land ». Dans cet opus, il revient aux sources des mélodies traditionnelles typiques des forêts de l’Afrique centrale, dix ans après avoir percé en occident. Attaché à ses racines, et aux valeurs que lui ont transmises ses ancêtres, le jeune artiste rend hommage au Cameroun, dont il défend l’héritage musical.
Afrik.com : Votre troisième album Just my land est composé de sonorités musicales très traditionnelles. Qu’est ce qu’il représente pour vous par rapport aux précédents ?
Erik Aliana : Dans ce disque, je puise toujours dans cette mélancolie et nostalgie de cette bonne Afrique traditionnelle. C’est ce que j’appelle l’Afrique de nos pères. C’est une façon de parler du Cameroun avec plus de profondeur. J’ai voulu reproduire un brassage musical entre le Cameroun du nord avec ses fameuses voix aériennes et le centre avec ses voix accompagnés de tambours puissants.
Afrik.com : Qu’est ce qui vous a mené à la musique ?
Erik Aliana : L’environnement familial dans lequel j’ai grandi m’a beaucoup inspiré. Etant plus jeune je passais beaucoup de temps au village avec mes parents. On assistait régulièrement à des cérémonies, et à des petits rites, qui regroupaient parfois plus de 50 personnes. L’ambiance était donc très festive, avec des chants traditionnels, des différentes danses. Tout cela m’a beaucoup nourrie. De plus, au sein de l’établissement où travaillais mon père, qui était proviseur, il y avait aussi des instruments de musique, comme la batterie qui me fascinaient. Il y avait de nombreux groupes de musique qui jouaient. J’adorais les regardais. La batterie symbolisait pour moi ma rencontre avec l’occident musicalement parlant.
Afrik.com : C’est important pour vous d’explorer le répertoire musical traditionnel qui a tendance à être de plus en plus délaissé en Afrique ?
Erik Aliana : J’irai même pus loin. Le répertoire musical traditionnel s’impose à moi. J’ai baigné dans cet univers qui m’a nourri, inspiré. Aujourd’hui je ne peux que l’explorer. C’est une musique belle, qui montre qu’un instrument traditionnel vous rappelle la terre, vous ramène à l’essentiel, et à la simplicité de la vie. Les musiques traditionnelles africaines sont très riches. Malheureusement elles sont de plus en plus délaissées. Je pense qu’après la colonisation, on n’a pas fait un travail de valorisation des musiques africaines. L’Afrique a tant offert au monde. Elle a donné un grand héritage musical sur le plan rythmique.
Afrik.com : C’est donc votre environnement familial qui vous a inspiré et permis de produire un album avec des sonorités traditionnelles aussi pures et profondes ?
Erik Aliana : Tout à fait. C’est tout l’univers dans lequel je baignais qui m’a inspiré. Je me souviens qu’au village, la sœur de ma mère chantait tout le temps. Ce sont ces chants qui m’ont inspirés. J’ai aussi beaucoup écouté les musiciens de l’Afrique de l’ouest, notamment le grand chanteur malien Habib Keita. Je pleurais en écoutant ses chansons. C’est sans doute l’un des seuls artistes qui réussit à me faire pleurer lorsque j’écoute ses titres. Il m’a fait croire en la musique africaine, en sa puissance. L’Afrique a une culture riche. Ici en occident on est constamment dans la course au gain. Les gens ne sont pas heureux. Il y a une telle pression qu’on est plus sensible aux autres. Humainement c’est la déconfiture. Or dans l’Afrique de nos pères, on retrouve l’essentiel de la vie, en étant en harmonie avec la nature.
Afrik.com : Quels sont les messages que vous délivrez à travers votre album?
Erik Aliana : J’évoque le quotidien. C’est une ode à la poésie, comme parlait les anciens à l’époque. Je parle des dangers que courent le monde. Un monde où l’amitié n’a plus de sens, où les individus sont de plus en plus hypocrites, où les jeunes n’ont plus le respect des aînés, où la course à l’argent n’a pas de limite, où le sexe est vulgarisé partout. Dans une de mes chansons, Kourougan, qui est le nom traditionnel qu’on donne au chef pygmée, je l’appelle à venir sauver ce monde en perdition. Je chante aussi les femmes qui ont une importance capitale au sein des foyers. Elles sont toujours présente pour protéger la famille et la souder.
Afrik.com : Votre succès a été tardif en occident alors qu’en Asie vous avez aussi une grande notoriété, notamment au Japon, où vous n’êtes d’ailleurs plus à présenter. Racontez nous comment vous avez réussi à séduire le continent asiatique ?
Erik Aliana : Il est vrai qu’au Japon j’ai réussi à me faire une place depuis de nombreuses années. Je suis régulièrement invité sur les plateaux de télévisions. Je participe aussi souvent à des Festivals avec des artistes africains tels que Tiken Jah Fakoly. Je me produis donc souvent en scène. Je pense que ceux qu’ils aiment dans ma musique ce sont les changements rythmes qu’on retrouve dans cette musique traditionnelle africaine. Même en Corée du Sud notamment j’ai pu faire mes marques. En occident, la reconnaissance a été tardive car on se dit c’est un artiste africain comme un autre. Des comme lui il y en a pleins. On a déjà entendu ce répertoire musical. Parfois, en occident on ne prend même pas la peine d’écouter votre musique qu’on a déjà des idées reçues sur vous. Finalement c’est mon succès en Asie qui a poussé l’occident à s’intéresser à ce que je fais. Or en Asie on vous écoute, on vous met à l’aise, on s’intéresse réellement à ce que vous faites. Ce n’est pas du tout la même vision des choses. C’est très encourageant.
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