Quand la communauté africaine de Mantes-la-Jolie (France) fête l’Epiphanie, l’église de la paroisse gronde d’une nouvelle énergie. Entre chants, folklore et tam-tam, la messe se fait festive au grand bonheur de toutes les ouailles. Reportage.
Comme chaque premier dimanche suivant Noël, l’Eglise célèbre l’Epiphanie, ou la manifestation de Jésus-Christ aux Rois mages. Dans le quartier du Val Fourré à Mantes-la-Jolie (France), la communauté africaine a préparé l’événement de longue date.
Il est 10h30. L’église Saint-Jean-Baptiste commence à se remplir. Un pagne bleu ciel paresse sur la grande croix derrière l’autel. Un autel, tout comme les deux pupitres, paré de fleurs et d’une grande nappe africaine brodée. Une dizaine d’icônes en terre cuite ornent les murs de la grande salle. A l’entrée, une statue du Christ en bois arbore un bogolan bleu marine. La messe de 11 heures ne s’annonce décidément pas comme les autres.
Congas, cerceaux, maracas et djembés
A gauche de l’autel, la chorale est déjà là. Presque au complet. Et presque exclusivement composée de femmes. Grand-mères, mères ou adolescentes, elles sont là, trois générations réunies, à discuter et se saluer en attendant le début de leurs tours de chant. Deux congas rouge vif et deux djembés attirent le regard et intriguent par leur présence en ces lieux. Pas pour très longtemps.
La messe commence. Le coeur de la chorale monte dans l’église, accompagné timidement pour l’instant par un djembé qui fait résonner ses premières notes. Puis le père Maurice, responsable de la communauté africaine dans le diocèse, accompagné du père Baudoin – le curée de la paroisse- et de deux autres prêtres, entame l’homélie devant un parterre coloré de fidèles où Africains et Antillais forment près des trois quarts des rangs.
Une communauté panafricaine
La communauté africaine du quartier dispose d’une trentaine de membres actifs. Mais elle peut mobiliser, comme pour Noël dernier, plus de quatre cents personnes autour de la même foi. Née sur une base fortement ethnique, avec les Mandjakes du Sénégal et de la Guinée Bissau, premiers émigrés arrivés à Mantes-la-Jolie, la communauté balaye aujourd’hui toute la diversité culturelle africaine. Ivoiriens, Béninois, Togolais, Congolais (Kinshasa et Brazzaville), Centrafricains, Nigérians, Ghanéens se côtoient désormais » pour faire vivre une communauté extrêmement vivante « , explique son président béninois Alphonse Soglo, élu par ses pairs.
Au cours du prêche, les chants, accompagnés maintenant d’un maracas, d’un cerceau et du djembé, se succèdent. En français mais également en lingala, togolais, béninois et nigérian. Tous sont traduits en phonétique sur un polycopié distribué à l’entrée de l’église pour que chacun puisse suivre. Temps fort de cette messe africaine de l’Epiphanie : la procession qui porte à l’autel les offrandes symboliques fait se tourner toutes les têtes. Amenés par une jeune fille d’une douzaine d’années chargée d’une corbeille de présents, six adolescents drapés dans le même tissu africain et un jeune couple étincelant vêtu de chatoyants boubous ocres et mauves remontent l’allée centrale au rythme d’un hymne liturgique entonné avec ferveur.
Partage et convivialité
» Ça rend la prière vivante ! » s’enthousiasme à la sortie de l’église une vieille femme blanche, peu habituée à un pareil spectacle. La cérémonie religieuse achevée, toutes les mines sont réjouies. Réjouies d’avoir assisté à cette messe peu ordinaire, réjouies d’avoir été témoins de ce grand moment de foi. Mais les choses ne s’arrêtent pas là. Car au sous-sol de l’église, les prêtres et les responsables de la communauté africaine invitent tout le monde à venir partager la galette des rois autour d’une exposition concoctée pour l’occasion sur l’ensemble des pays de l’Afrique chrétienne. Encore une fois ils feront salle comble.