Se rencontrer pour mieux entreprendre dans la lutte contre un fléau qui touche plus d’un milliard de personnes dans le monde: la faim. Pour la première fois depuis sa création il y a cinq ans, l’association ALLIES a invité, mercredi, à Paris, un réseau d’ONG, entreprises et collectivités à réfléchir ensemble et en temps réel à des solutions durables contre la faim, en France et dans le monde. « Cent bons projets ne permettent pas une politique de développement efficace si ces projets ne se connaissent pas entre eux » a insisté le président de l’association et ancien ministre de la coopération Jacques Godfrain. La rencontre était accueillie par le groupe Sodexo, membre du réseau d’Alliés.
Le modèle des « supers potagers »
Exemple de collaborations réussies entre acteurs privés et acteurs publics: Danone et la Grameen Bank, Sodexo et les Restos du Coeur qui ont chacun détaillé leurs travaux sur le terrain. Un engagement social capable de créer des innovations surprenantes comme les « supers potagers », présentés par l’association Pro-Natura et le groupe JTS semence. Déjà utilisée au Niger et au Sénégal, cette technique agricole basée sur l’utilisation du biochar, permet de fertiliser les sols en faisant des économies de 80% en eau et de produire ainsi suffisament de nourriture pour 10 personnes sur une surface de 60 m² en zone aride. « Le groupe JTS a versé l’investissement de départ et nos idées ont été très bénéfiques pour eux en termes de recherche et de développement » a indiqué Guy Reinaud, président de l’association Pro-Natura. De nouvelles installations sont prévues dès le mois de novembre en Algérie.
Un cahier des charges complexe
Le label ALLIES
L’association ALLIES rassemble un réseau d’acteurs des secteurs publics et privés au service des plus démunis. Créée en 2004 sous l’impulsion de l’organisme des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), ALLIES fait partie de l’Alliance internationale contre la faim. Depuis 2007, un label éthique est attribué aux entreprises, collectivités et associations qui souhaitent s’engager dans la lutte contre la faim, la malnutrition et la pauvreté. Pour déposer un dossier, les groupes intéressés peuvent contacter le président du comité éthique Gilles Hirzel: gilles.hirzel@wanadoo.fr |
La rencontre a donné l’occasion aux quatorze ONG présentes de passer au micro pour défendre leurs projets et imaginer des marriages possibles avec des entreprises comme Sodexo, Véolia Environnement ou Total. Des rencontres entre deux cultures de travail dont les valeurs peuvent diverger.
« Nous n’avons pas vocation à être de simples machines à sous » a prévenu Dominique Héron, directeur des partenariats pour l’entreprise Véolia Environnement avant de lister le cahier des charges en cinq points examiné sur chaque dossier: « présence sur place, relais locaux, apport en compétence, processus de travail maîtrisé et opérations transférables pour des coopérations Sud-Sud ».
Une liste d’exigences à laquelle s’est empressée de répondre Stéphanie Rivoal de l’association Action contre la faim: « Bien sûr, nous avons besoin d’apports techniques et financiers mais nous traitons beaucoup de situations dans l’urgence et nous devons faire preuve de flexibilité! »
Plusieurs participants ont regretté l’absence d’acteurs politiques pourtant incontournables en matière de développement. « Ils étaient invités » a rétorqué l’un des organisateurs. Le président de l’Alliés s’est voulu encourageant: « C’est parce que le travail sera long qu’il faut s’y prendre sans tarder » a-t-il lancé a l’assemblée. Le responsable de la communication de l’ONG Afrique Verte, Nicolas Lebeurier a terminé la journée plutôt satisfait: « Nous ne nous attendions pas à décrocher un contrat directement. Cette journée m’a surtout permis de réaliser que nous pouvons parler un language commun avec les entreprises ». Un premier pas vers de nouveaux modèles de partenariats prometteurs, à condition d’aller vite, car si « tout peut attendre, l’agriculture elle, n’attend pas » (Nehru).
Par Manon Aubel