
Depuis début avril, Claude Mangin, militante des droits humains et épouse du prisonnier politique sahraoui Naâma Asfari, a entrepris une marche de plus de 700 kilomètres à travers la France pour sensibiliser à la situation du peuple sahraoui. Si son initiative suscite un soutien croissant, elle a également été confrontée à des tensions, notamment à Béziers, où sa progression a été perturbée par des militants pro-marocains.
Partie d’ivry pour atteintre Kenitra, soit 3000 km, la marche de Claude Mangin-Asfari s’inscrit dans une campagne citoyenne pour dénoncer l’occupation du Sahara occidental par le Maroc et exiger la libération des prisonniers politiques sahraouis. À travers son périple, la militante souhaite également interpeller les autorités françaises sur leur position ambiguë vis-à-vis de ce conflit, tout en rendant hommage à la résilience du peuple sahraoui.
Chaque étape de cette marche est l’occasion de rencontres avec des élus, des collectifs associatifs, des défenseurs des droits humains et des citoyens engagés. À Lyon, à Clermont-Ferrand, à Nevers ou encore à Bourges, des débats, colloques et lectures publiques ont ponctué le trajet. Des lettres adressées à Emmanuel Macron ont été déposées devant plusieurs préfectures pour demander une reconnaissance de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) et la fin du soutien diplomatique implicite au Maroc.
L’incident de Béziers : des tensions mises à nu
C’est à Béziers, lors d’une halte symbolique devant la mairie, que la marche a connu son seul incident notable jusqu’à présent. Alors que Claude Mangin s’apprêtait à lire un message en soutien aux prisonniers sahraouis, un groupe de manifestants pro-marocains, arborant des drapeaux rouges frappés de l’étoile verte, a tenté de perturber le rassemblement. Des slogans hostiles à la cause sahraouie ont été scandés, des journalistes de l’Equipe Médias attaqués.
Une brève bousculade s’en est suivie avant l’intervention des forces de l’ordre. Aucun blessé n’a heuresement été signalé. Claude Mangin a appelé au calme, réaffirmant le caractère pacifique de son action : « Ce face-à-face démontre combien ce conflit reste sensible, et combien il est urgent d’ouvrir un espace de dialogue et de vérité. »
Une dynamique militante en expansion
Malgré cet incident isolé, la marche bénéficie d’un soutien croissant. Plusieurs eurodéputés, notamment de La France insoumise, d’Europe Écologie Les Verts et du Parti communiste français, ont publiquement salué l’initiative. Des artistes, universitaires et figures du monde associatif ont également marché aux côtés de Claude Mangin sur certaines étapes. Françoise Dumont, ancienne présidente de la Ligue des droits de l’Homme (LDH), a accompagné une étape dans la région Centre, et rappelé l’engagement de la LDH pour l’autodétermination du Sahara occidental. Dominique Vidal, historien et journaliste, a animé une rencontre-débat autour de la question sahraouie en appui à la marche et Rony Brauman, ancien président de Médecins sans frontières, a signé un appel de soutien à la marche et participé à une conférence de presse à Lyon.
La mobilisation intervient dans un contexte juridique et politique particulier : en octobre 2024, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a de nouveau annulé des accords commerciaux entre l’Union et le Maroc, estimant qu’ils violaient le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. Une décision saluée par les partisans de la cause sahraouie mais ignorée par plusieurs chancelleries européennes, dont Paris.
Un rendez-vous à Paris
Partie d’Ivry-sur-Seine début avril, la marche a d’abord pris la direction du sud, en descendant jusqu’à Béziers, dans une trajectoire symbolique vers Kénitra, la prison marocaine où Naâma Asfari, le mari de Claude Mangin, est incarcéré depuis plus de dix ans. Ce choix d’itinéraire marque une volonté de marcher vers le lieu de détention pour lui opposer la liberté, avant de remonter vers Paris, capitale politique, où le combat pour la reconnaissance des droits du peuple sahraoui doit, selon Claude Mangin, être porté avec force.
L’arrivée de la marche est prévue à Paris le 25 mai, avec un grand rassemblement place de la République. Plusieurs organisations de défense des droits humains, collectifs sahraouis, personnalités politiques et militants associatifs y sont attendus. L’événement vise à clore la marche sur une note forte, tout en lançant un appel solennel à la France : reconnaître le droit du peuple sahraoui à décider de son avenir.
Pour Claude Mangin, « ce combat n’est pas seulement sahraoui, il est universel. Il dit quelque chose de notre rapport à la justice, à la vérité, à la mémoire. » Sa marche, aussi physique que politique, trace un sillon pour ceux qui refusent l’oubli.