La polémique enfle après l’introduction du premier lot de vaccins contre le Coronavirus, dans la soirée du 2 mars en République Démocratique du Congo. Si, pour les autorités sanitaires, l’efficacité de la riposte passe par la vaccination, plusieurs Congolais demeurent sceptiques, estimant qu’elle n’est pas opportune dans un pays qui, selon eux, « s’en sort bien » face à cette maladie qui ébranle le monde entier.
Dans la rue et sur la Toile, l’introduction, dans la soirée du 2 mars, du premier lot de vaccins contre le Coronavirus alimente la polémique entre des Congolais qui expriment leur scepticisme face à l’intégration du vaccin dans la riposte contre le Coronavirus, en République Démocratique du Congo. Reportage !
La matinée de ce 3 mars est mouvementée à la place de l’Indépendance, l’un des points d’attractions de Bukavu ; ville située dans la façade Est de la RDC. Un groupuscule d’étudiants ici, quelques commerçants là-bas. A quelques mètres d’eux, des conducteurs des taxis motos dans l’attente des clients en pleine discussion sur l’introduction de ce vaccin.
« Le vaccin n’est pas une priorité pour nous »
Pour certains d’entre eux, le vaccin contre le Coronavirus n’est pas opportun dans un pays qui a fait ses preuves face à la pandémie. « Depuis mars 2020, la RDC fait face à la pandémie du Covid-19. A voir les chiffres publiés par les autorités sanitaires, il y a lieu de dire que le vaccin contre le Covid-19 n’est pas opportun », déclare à AfriK Bahati l’un des conducteurs des taxis moto.
Pour son collègue Idriss, « le vaccin » contre le Covid-19 « n’est pas une priorité pour nous ». Ce jeune sans cache-nez estime que « les autorités devraient plutôt intensifier les sensibilisations sur le respect des mesures barrières et non introduire rapidement ce vaccin, qui risque d’entraver les activités d’une riposte fragilisée par la résistance et la gestion opaque », assène-t-il.
« Pourquoi devrais-je me vacciner ? »
A quelques mètres de ces conducteurs des taxis motos, se trouvent des cambistes qui ajustent leurs cache-nez sur le menton. Sans aucun respect des mesures barrières, ces Congolais n’hésitent pas à se faire des accolades. D’après eux, « la pandémie du Coronavirus a prouvé ses limites face à un peuple résilient ». Une situation qui pousse Madame Furaha à remettre ce vaccin en question. « Pourquoi devrais-je me faire vacciner, alors que certains Européens, qui sont les plus affectés par cette maladie, refusent de se faire vacciner aussi ? ». Et sur la Toile, la polémique autour de ce vaccin alimente les discussions de plusieurs internautes.
https://twitter.com/MFINDA_243/status/1366996258913726470?s=20
Les vaccins anti covid en RDC…le peuple a plus besoin de la securite, des routes et de l'effectivité de la gratuité de l'enseignement. Mieux de renforcer les mesures barrières que imposer un quelconque vaccin…
— Adrien Zawadi (@AdrienZawadi) March 2, 2021
Après des sondages en Europe et Amérique la majorité de la population ne veut pas de ce vaccin, ne l’apporter pas en Afrique et précisément au Congo, on n’en veut pas.
— NMJ23 (@Joel_Mat_Ngandu) February 25, 2021
« Sauver des vies »
En février dernier, après son ascension à la tête de l’Union Africaine, le chef de l’État congolais, Félix Tshisekedi, avait plaidé auprès de l’Union Européenne pour l’aide à la fourniture de vaccins en Afrique. Après la réception du premier lot de vaccins contre le Coronavirus, le ministre de la Santé, a déclaré à la presse que « la RDC est parmi les premiers pays d’Afrique à recevoir ces vaccins. La vaccination nous permettra de protéger et sauver des vies ». Avec plus de 26 000 cas confirmés, 20 466 guéris et 711 décès, le Dr Eteni Longondo ajoute que « nous devons encourager la population cible à se faire vacciner». Des propos rapportés par les médias congolais.
La réticence autour des vaccins, parmi les défis de la santé mondiale
En 2019, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) avait inscrit la réticence autour des vaccins parmi les défis de la santé mondiale, pour les dix prochaines années. En RDC, la réticence face aux vaccins n’est pas nouvelle, car, en 2018, les populations de la province de Lualaba s’étaient insurgés contre la campagne de vaccination contre la poliomyélite, avant qu’elles n’y adhèrent, après plusieurs séances de sensibilisation. Cette attitude avait été observée en 2019, alors que le virus Ebola était déclaré dans les provinces du Nord-kivu, Sud-kivu et Ituri, dans l’Est du pays. Selon Kabongo Mbuta, chercheur en Sciences de l’Information et de la Communication, « les autorités devraient intensifier les séances de sensibilisation sur la valeur ajoutée du vaccin dans la riposte contre le Coronavirus ».
Notons qu’avant l’arrivée de ce lot de vaccins, des rumeurs circulaient sur le début d’une campagne de vaccination dans les écoles en République Démocratique du Congo. Vite, ces rumeurs avaient été démenties par les autorités après la perturbation du déroulement des cours dans des écoles, à Bukavu et Lubumbashi, dans l’Est du pays.