Deux employés musulmans de l’aéroport de Roissy, en région parisienne, ont récupéré mercredi leurs badges d’accès à des zones sécurisées. Ces derniers leur avaient été retirés, ainsi qu’à 70 autres salariés, après qu’ils aient été interrogés sur leurs pratiques religieuses. La justice a autorisé mercredi six d’entre eux à accéder aux documents qui ont motivé le retrait de leur outil de travail.
Au total, 72 employés de confession musulmane se sont vus retirés leurs badges d’accès à des zones sensibles de l’aéroport de Roissy, depuis un an, sur des bases religieuses, selon eux. Huit ont saisi la justice contre le préfet de Seine-Saint-Denis, à l’origine de la décision, le 19 octobre dernier, avec l’appui de la CFDT (Confédération française démocratique du travail, syndicat). Mercredi, alors que la demande d’accéder aux documents motivant leur retrait d’habilitation était étudiée au tribunal de Bobigny, Me Georges Holleaux, l’avocat de la préfecture de Seine-Saint-Denis, a annoncé la restitution de deux badges sur huit. « Je ne sais pas pourquoi [ils] ont été retirés. Je ne sais pas encore aujourd’hui pourquoi [ils] ont été restitués », a indiqué Me Daniel Saadat, l’un des avocats des plaignants.
En revanche, Me Georges Holleaux a remis au procureur de la République les documents justifiant le retrait des badges aux six autres salariés. Une victoire pour la défense. Car le sous-préfet chargé de la zone aéroportuaire de Roissy refusait jusque-là de motiver ses décisions. Il évoquait « un danger significatif » que les employés faisaient peser sur « la sûreté aéroportuaire », en se basant sur des enquêtes de l’Unité centrale de lutte antiterroriste (Uclat), sans plus de détails. Nicolas Sarkozy l’avait soutenu en soulignant un « devoir de précaution » de la part des autorités. Un devoir que ne nient pas les syndicats qui soutiennent les employés, de même que leurs avocats. Mais si les conclusions des enquêtes doivent avoir des conséquences sur la vie des salariés, elles doivent leur être communiquées, expliquent-ils. « Si les 72 sont terroristes, ça fait peur. Dans ce cas on n’est pas dangereux que pour l’aéroport », avait ironisé mardi l’un des employés en conférence de presse.
« Relations avec la mouvance salafiste… »
Mercredi, Eric Moutet, l’autre avocat des salariés, a consulté les dossiers des six salariés toujours mis en cause. Selon lui, les charges sont « faibles ». D’après des documents qu’il s’est procuré, le quotidien gratuit 20 Minutes indique qu’il « est reproché à un salarié d’avoir été l’objet en septembre 2004 d’une « mise en garde de son employeur à l’aéroport alors qu’il revendait des flacons d’essences de parfum de grandes marques sur son lieu de travail », ainsi que ses « relations avec des islamistes radicaux » . A un autre, d’ »être en relation avec un militant intégriste lié à des individus évoluant dans la mouvance salafiste ». » S’agissant des autres cas, Eric Moutet évoque « des éléments à éclaircir avec ses clients », selon le journal.
Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise examine vendredi des référés en suspension déposés par neuf employés, parmi lesquels six sont parties prenantes dans l’affaire examinée mercredi. L’enquête préliminaire ouverte par le tribunal de Bobigny, suite au dépôt d’une plainte pour discrimination, est toujours en cours.
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Crédit photo : JDM / Cécile Debise 2006