Tous les dimanches à 15h30, au début de ce « conte initiatique », Emil Abossolo-Mbo prend le public du Théâtre de la Reine Blanche par la main, et à la fin de l’histoire, il le libère doucement, prêt à affronter le monde. Entre temps, plus d’une heure et demi d’émotion pure. Chapeau bas l’artiste!
On arrive dans ce grand théâtre parisien, métro La Chapelle, passage Ruelle, le dimanche après-midi, sans trop savoir ce qu’on va voir. On regarde dans l’assistance, on reconnaît Lilian Thuram dans un angle, qui parle avec Olivier Zegna Rata de Canal+ et le producteur Eric Idriss-Kanago. Eux-aussi sont venus par la vertu du bouche à oreille, parce qu’on leur a parlé d’un spectacle inoubliable, le one-man-show d’Emil Abossolo-Mbo.
On s’assied dans de beaux fauteuils de théâtre, rouges, dans un décor un peu new-yorkais de poutrelles de béton brut… La lumière baisse. Et l’histoire commence.
Ce conte est une initiation, et c’est une vie. Elle se déroule de l’enfance à l’âge adulte, d’un petit village du nord du Cameroun, dans la forêt, jusqu’à l’ailleurs radical du monde adulte et de la mondialisation. La performance de l’acteur est de nous mettre dans la peau de l’enfant qui grandit, en jouant les rencontres et les personnages qu’il découvre, les étapes de cette initiation.
Combien en joue-t-il? Cent? Deux cents? Tous avec leur accent et leurs mots, tous avec leur regard et leurs opinions, êtres factices ou trop réels, symboliques ou très concrets, qui structurent progressivement l’imaginaire et la pensée de l’enfant, pour en faire un adolescent, pour nourrir sa révolte, pour le projeter enfin dans l’âge adulte.
L’émotion est à chaque fois au rendez-vous, tellement chaque personnage est juste, les larmes montent aux yeux, le rire nous secoue, on reste parfois dubitatif devant les vérités révélées, on reconnaît telle ou telle étape qu’on a vécue soi-même… Et la ronde continue, Emil Abossolo-Mbo ne nous laisse pas le temps de nous arrêter, ni bonheur ni désolation, la roue tourne, l’enfant grandit et nous grandissons avec lui.
« Champs de sons » est une expérience profondément africaine, et c’est une expérience universelle. Ce Conte moderne et contemporain parle à chacun d’entre nous, d’où qu’il vienne, et livre à tous une part de vérité sur lui-même et autrui. Chacun de nous a dû composer sa propre musique dans cette symphonie plurielle qu’il n’a cessé d’entendre autour de lui, et Emil Abossolo-Mbo nous montre joyeusement comment nous nous sommes construits.
C’est tous les dimanches, à Paris, métro La Chapelle, impasse Ruelle, à 15h30, et, si l’on peut, il faut absolument s’y rendre, pour vivre cette expérience majeure. Pour les parisiens et les habitants de l’Île-de-France, à ne manquer sous aucun prétexte.
Emil Abossolo-Mbo, « Champs de sons », conte initiatique, Théâtre de la Reine Blanche, 2 bis impasse Ruelle, 75018, PARIS métro La Chapelle/Max Dormoy, les dimanches 7, 14, 21, 28 mars à 15h30.
Réservations : 01 40 05 06 96
Crédits photo : Emil Abossolo-Mbo