Jean Michel Nitcheu, coordonnateur provincial du Social Democratic Front (SDF) pour le Littoral, a organisé la semaine dernière, à Douala, une « Semaine des martyrs de février 2008 » afin que de telles atrocités ne se reproduisent plus. Les émeutes, violemment réprimées, avaient fait plusieurs dizaines de morts.
Notre correspondante au Cameroun
En février 2008, les Camerounais exprimaient leur ras-le-bol face à la vie chère, la hausse du prix du carburant à la pompe, ainsi que face à la révision de la constitution qui donnait la possibilité au président Biya de se représenter aux élections présidentielles de 2011 et, pour finir, l’interdiction d’une manifestation du parti d’opposition Social Democratic Front (Sdf). Le bilan humain des émeutes a été lourd. Les pertes en vie humaines ont été évaluées à environ 40 morts selon le gouvernement, 139 pour l’Observatoire national de défense des droits de l’homme et plus de 200 selon le Social Democratic Front.
Afrik.com : Vous avez organisé une semaine dénommée la « Semaine des martyrs », du 23 au 27 févier 2009, à Douala. De quoi était-il question ?
Jean Michel Nitcheu : Les manifestations avaient pour but la commémoration des victimes de février 2008. Vous savez que des jeunes qui étaient descendus dans la rue avaient subi un déferlement de l’armée et de la police camerounaises. Il y a eu environ 200 jeunes tués. Et pour eux, nous avons décidé de commémorer la semaine des martyrs. Les martyrs de la liberté, car ils sont morts pour la liberté.
Afrik.com : Vous parlez de 200 morts, l’observatoire des droits de l’homme parle de 139 et le gouvernement de 40. Quel est finalement le bon chiffre ?
Jean Michel Nitcheu : Vous savez, nous ne faisons pas la guerre des chiffres. J’ai été sur le terrain. Il y a des jeunes qui ont manifesté lors des émeutes et ont été tués ce jour-là. D’autres, par contre, ont été blessés et sont morts deux semaines ou un mois après. J’en ai les preuves. En réalité, les chiffres définitifs ne sont pas en dessous de 200 morts.
Afrik.com : Quels étaient les points essentiels de cette semaine des martyrs ?
Jean Michel Nitcheu : Nous avons mené des activités de lundi à vendredi derniers. Nous avons rencontré les autorités administratives afin d’obtenir une autorisation de manifester. Les jeunes transporteurs nous ont assistés pour assurer la sécurité et les forces de l’ordre étaient présentes pour éviter les débordements. Nous avons fait des messes d’action de grâce et rendu visite aux prisonniers et aux familles des victimes.
Afrik.com : En définitive, tout s’est t-il bien passé ?
Jean Michel Nitcheu : Vous savez, pour le gouvernement, il ne faut pas dénoncer le pouvoir en place. Ça veut dire que les interdictions de manifestations sont des prétextes pour que personne ne dénonce les dérives du régime. Pourtant, il suffit que chacun fasse son travail et que nous autres fassions le travail d’encadrement les manifestants pour que tout se passe bien. Ça se fait dans tous les pays, dans toutes les démocraties. On ne tue pas les jeunes qui manifestent. C’est pourquoi nous avons choisi comme slogan pour la semaine des martyrs : « Plus jamais ça ! ».
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