Habitués à l’affrontement et craints par les pouvoirs publics, les mototaximen évitent le quartier Deido dont l’accès leur est désormais interdit par le préfet. Les forces de l’ordre veillent.
La vie a repris son cours normal au quartier Deido à Douala, l’un des plus animés de la ville. Des gendarmes et policiers armés de gourdins, de matraques et d’armes à feu sont postés à l’entrée de chaque rue de ce quartier. Objectif : dissuader tout conducteur de moto d’y rentrer avec son engin. La mesure fait suite à un arrêté du préfet du Wouri de jeudi dernier qui interdit la circulation des mototaxis à Deido, et ce, jusqu’à nouvel ordre. En effet, au petit matin du 31 décembre 2011, un jeune homme originaire de ce quartier est mortellement poignardé non loin de son domicile par un individu à bord d’une moto.
Furieux, les habitants du quartier engagent une chasse aux mototaxis à l’arrêt. Les chauffeurs sont bastonnés et leurs engins incendiés. Ces échauffourées se sont transformés en de véritables émeutes qui paralysent la circulation et la quiétude des citoyens qui habitent ou passent par ce quartier.
Plusieurs centaines de policiers et gendarmes armés et accompagnés de dispositif anti-émeute ont été déployés dans le secteur. La situation semblait maitrisée, mais a repris de plus belle au lendemain du nouvel an. Révoltés, les mototaximen partiront de plusieurs autres coins de la ville pour porter secours à leurs collègues. La situation dégénère. Plusieurs dizaines de motos sont incendiés. De nombreux blessés et deux morts sont enregistrés.
Plus de mototaxis à Deido
Cette situation a provoqué une levée de boucliers des autorités traditionnelles, politiques et autres élites originaires de la ville de Douala. Les chefs des six principaux cantons de la ville vont alors adresser le 3 janvier une lettre au préfet lui suggérant « de bien vouloir procéder à l’interdiction de la circulation des motos taximen à l’intérieur du périmètre du Canton Deido et ceci au moins jusqu’à la date des obsèques du défunt ». Une requête suivie par le préfet et qui sera accompagnée d’une forte présence des forces de sécurité dans le périmètre concerné.
« Nous respectons cette décision et d’ailleurs, nous pouvons aisément travailler en dehors de Deido », soutient Léo, un conducteur de moto. « C’est injuste mais que faire, notre syndicat va attaquer cette décision si elle perdure », renchérit Landry, un autre de ces collègues.
Surprenant. Les mototaximen qui se chiffrent à plus de 50 000 dans la ville de Douala sont réputés insubordonnés et toujours prêt à défier les autorités. Véritables seigneurs de la rue, ils n’hésitent pas à paralyser la ville, cassant tout à leur passage chaque fois que leurs intérêts sont menacés.
La mesure temporaire cette fois fâchent-elle moins ? En avril 2010, les mototaximen avaient déjà été interdits de circulation dans le quartier administratif de Bonanjo non sans avoir résister avant de se résigner. Leur plus grande victoire reste le refus de respecter les dispositions du décret du premier ministre de 2008 qui réglementait cette profession.
Ils continuent depuis lors de circuler parfois sans permis de conduire, de carte grise, de plaque d’immatriculation, sans assurance ou sans des casques prévus entre autres par la réglementation occasionnant de nombreux accidents mortels.