Bénin, Congo, Gabon : 3 élections africaines, trois échecs de la France. Quelle leçon tirer des trois scrutins en Afrique francophone? Le soutien du Président et des médias français ne fait plus l’élection en terre d’Afrique. Nicolas Sarkozy avait dû recourir à l’armée pour imposer Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire, François Hollande n’ose pas aller jusque là, mais aligne les défaites.
En quelques mois, les candidats ouvertement ou discrètement soutenus par les intérêts français ont connu une succession de défaites. Bénin d’abord : Talon l’emporte contre Lionel Zinsou, brillant intellectuel, banquier émérite, produit de l’Ecole normale supérieure, mais qui avait contre lui d’être soutenu par son mentor Laurent Fabius et son camarade François Hollande.
Congo ensuite : la détestation viscérale de François Hollande pour Denis Sassou N’Guesso semblait, il y a à peine un an, un handicap majeur pour le Cobra suprême, seigneur d’Oyo, depuis deux mandats déjà maître de Brazzaville. Pourtant, c’est sans coup férir et par le jeu des urnes que le Président congolais a successivement modernisé sa Constitution, puis emporté haut la main une Présidentielle disputée, contre un général à la retraite, ouvertement soutenu par les médias français.
Gabon enfin, où la presse française accomplissait le tour de force de présenter comme le héros de l’alternance… Jean Ping, le propre gendre d’Omar Bongo, époux de son héritière et exécutrice testamentaire Pascaline, qui a gardé les clefs du coffre familial. Jean Ping, soutenu par tout le clan des vieux barons dont le ralliement sonnait comme un retour de la vieille garde de la Françafrique, parée des atours immaculés d’une factice « rupture » avec la dynastie Bongo… Alors que son argument principal consistait à contester la nationalité gabonaise au Président sortant !
Les électeurs gabonais allaient-ils se laisser abuser par ce jeu de dupes? Il n’en a rien été, même si c’est d’une courte tête qu’Ali Bongo, Président original à l’esprit indépendant, l’a finalement emporté. S’ensuivent manifestations violentes, incendies, émeutes annoncées et en partie provoquées par l’excitation médiatique et le chœur des bien-pensants européens, dûment cornaqués par le Quai d’Orsay.
Mais les observateurs avisés sont obligés de reconnaître que le seul défaut d’Ali est en réalité son patronyme, celui-là même que l’on essaie de lui dénier, ce nom de Bongo que les sectateurs de Jean Ping avaient si longtemps révéré qu’ils croient expier leurs péchés en le conspuant désormais.
A moins que l’on ait en réalité voulu faire payer à Ali Bongo sa volonté explicite de diversifier les partenariats économiques, de quitter le giron exclusif des entreprises françaises, de rechercher ailleurs que dans l’ancienne métropole exsangue les investissements indispensables qui lui permettent de faire face à la chute des recettes pétrolières. La solution contre les efforts d’indépendance de l’héritier, le recours au « canal historique » de la maison Bongo, incarné par Jean Ping, à toute allure vers « l’avenir », en marche arrière…
Mais on dirait que les peuples africains ont appris à choisir leur destin eux-mêmes, sans souci de contrarier l’Elysée, et peut-être même en prenant plaisir à déjouer les ruses de Paris. Leçon à retenir pour les prochains scrutins d’Afrique francophone : pour un candidat qui veut l’emporter, se défier avant toute chose… du soutien de François Hollande !