Les Frères musulmans et l’opposition se sont rencontrés pour calmer les tensions en Egypte. Une entrevue qu’il y a encore quelques jours aurait été impossible. Ce rapprochement prouve que les opposants doivent dialoguer avec le parti au pouvoir. Carnet de bord : l’opposition est-elle assez forte pour rivaliser avec les Frères musulmans ?
Des responsables des Frères musulmans et de l’opposition libérable égyptienne se sont rencontrés en privé pour tenter de ramener le calme dans le pays. Depuis fin janvier, près de soixante personnes ont été tuées dans des affrontements entre forces de l’ordre, pro et anti-Morsi. Selon Cosmopolis, le coordinateur de la principale alliance oppositionnelle, Mohamed El Baradeï, du Front de salut national (FSN), a rencontré, samedi 16 février, Saad el Katatni, le chef du parti Liberté et Justice (PLJ), la vitrine des Frères musulmans.
Jusqu’à présent, l’opposition progressiste et libérale avait toujours refusé de négocier ou d’entrer en discussion avec Mohamed Morsi et les membres de son parti. Plus encore depuis que le président égyptien s’est quasiment approprié les pleins pouvoirs avec sept décrets constitutionnels décidés fin 2012. Malgré tout, l’opposition égyptienne ne représente pas un poids important sur le plan politique intérieur. D’après le sondage réalisé en février 2013 par le journal indépendant égyptien Al-Shorouk, 80% des Egyptiens ne se voient pas être représentés par le FSN.
Une faible opposition
Les trois dirigeants du FSN sont Hamdine Sabbahi, adepte du nationalisme et socialisme Nasser, Mohamed El Baradei, ancien directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique, et Amr Moussa, ancien ministre des Affaire étrangères de Moubarak et ancien secrétaire général de la Ligue arabe.
Pour l’heure, l’opposition égyptienne n’a pas réussi à marquer la politique comme l’on fait les Frères musulmans sous le régime de Hosni Moubarak. Pendant des décennies, ils ont été la seule force opposée à l’ancien raïs. Ses membres ont subi la torture, l’emprisonnement et l’exil. Un parcours qui a inévitablement marqué les esprits et un retour triomphale pendant le soulèvement populaire égyptien.
Les partis qui ont vu le jour après le régime dictatorial doivent encore trouvé leur voie, un programme cohérent et des leaders pragmatiques. Car même avec trois partis rassemblés en un pour former le Front de salut national, créé en novembre 2012, l’opposition ne convainc pas tout à fait. Aux yeux des Egyptiens, seul Sabbahi, avec ses 17 incarcérations sous l’ancien régime, est un véritable opposant. Arrivé 3e à l’élection présidentielle de 2012, Sabbahi a raflé 21,5% des voix.
Une Egypte libérale, progressiste et démocratique ? L’idée peut plaire. Mais l’agenda élaboré par cette coalition oppositionnelle n’a pas encore persuadé. Aucun de ces trois leaders politiques ne s’aventure dans les milieux sociaux défavorisés, contrairement aux Frères musulmans qui depuis des années s’activent dans ce terrain. Pourtant, ces milieux représentent 40% de l’électorat égyptien.
Pour se faire entendre, l’opposition doit encore roder son programme politique et aller au plus près des populations. Car pour le moment, elle ne fait plus de bruit qu’autre chose. Toutefois, elle ne peut pas faire en trois mois ce que les Frères musulmans ont réussi après un travail de plusieurs dizaines d’années.