Le président égyptien, Mohamed Morsi, a annoncé samedi la rupture de toute relation diplomatique avec la Syrie et somme le Hezbollah de quitter le territoire syrien. Prononcé dans un contexte politico-économique particulièrement difficile en Egypte, son discours est jugé par certains comme une « vraie farce ».
« Nous avons pris la décision ferme aujourd’hui de rompre toute relation avec la Syrie et le régime syrien ». Le ton est donné. Mohamed Morsi ne mâche pas ses mots. L’actuel président égyptien va plus loin et déclare. « Le Hezbollah doit quitter la Syrie. Je suis très sérieux dans mes déclarations. Le Hezbollah n’a pas sa place en Syrie ».
Une déclaration au relent de guerre contre le régime syrien prononcée devant des milliers de fidèles samedi au Caire. Les avis sont partagés. Du côté de Damas, on condamne une décision
« irresponsable ».
« La Syrie condamne cette position irresponsable qui reflète la volonté de Mohamed Morsi de mettre en place l’agenda de la Confrérie Musulmane. La Syrie reste convaincue que le parti des Frères Musulmans égyptiens fera tomber ces genres de politiques et leurs graves conséquences sur la région », ont réagi les autorités syriennes. Avant d’ajouter : « Mohamed Morsi vient ainsi de se joindre à un groupe de comploteurs dirigé par les Etats-Unis, l’Israël contre la Syrie ».
« Une vraie farce »
Si la Syrie dénonce les propos « irresponsables » de Mohamed Morsi, l’opposition égyptienne parle de farce. Certains tels que Nader Bakki, vice-président des Affaires médiatiques pour la mouvance salafiste Al-Nour, souligne une déclaration contradictoire à celle prononcée à Moscou appelant à défendre le gouvernement de Bachar Al-Assad.
Et d’autres dénoncent le caractère comique de cette position.
« Le discours était une vraie farce pour menacer ceux qui voudront protester le 30 juin », affirme Heba Yassin, Porte-parole du parti de l’opposition Al-Tayar Al-sha’aby. « Malgré tous ses discours, sa cote de popularité ne cesse de décroître. Ce qui prouve encore une fois son incapacité à gérer le pays. Les islamistes ne voient que l’aspect sectaire du conflit syrien, c’est-à-dire entre Chiite et Sunnite. Ils ne voient pas que c’est un soulèvement contre un régime dictateur ».
Stratégie politique ?
Décision sérieuse ou manœuvre purement politique ? Mohamed Morsi n’est pas à sa première sortie médiatique sur le dossier syrien. En août 2012, lors de son déplacement au sommet des non-alignés à Téhéran, le président égyptien dénonce le régime « oppressif » de la Syrie.
Une dénonciation qui avait profondément choqué les représentants syriens présents au sommet. La délégation syrienne quitte la salle pour protester contre le discours de Mohamed Morsi. « La délégation syrienne a quitté pour protester contre le contenu du discours de Morsi qui est une ingérence dans les affaires intérieures syriennes et une incitation à la poursuite du bain de sang en Syrie », avait affirmé Wallid Mouallem, chef de la diplomatie syrienne.
Le jeu de Morsi, en tournant le dos au régime syrien, reste toujours une énigme. Tactique politique pour plaire à Washington ? En tout cas, tout laisse à le croire. Au moment où le pays traverse une profonde crise financière, toutes les pistes, pour séduire l’Occident et sortir de l’ornière, semblent exploitables pour le président égyptien.