Une centaine de porcs jetés dans une benne, tués chimiquement et enterrés dans la chaux. La vidéo du quotidien Al-Masri Al Yom en ligne, ce week-end, témoigne de la poursuite de l’élimination du cheptel porcin en Egypte. Une opération qui suscite de vives critiques alors même que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) n’a recensé, pour la grippe A (H1NI), aucune contamination de l’homme par l’animal.
La vidéo du massacre des porcs en Egypte fait scandale. Le quotidien indépendant Al-Masri Al-Yom a diffusé, ce week-end, sur YouTube, des images chocs : une centaine de cochons jetés dans des bennes, tués chimiquement et enterrés dans la chaux. L’Egypte continue de massacrer son cheptel porcin afin de se prémunir contre la grippe A (H1N1), alors que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) n’a recensé aucun cas de contamination directe du porc à l’homme par le virus.
Cette mesure suscite de vives réactions dans le pays. Les intellectuels musulmans et chrétiens accusent le président Hosni Moubarak de soutenir l’opposition islamiste des Frères musulmans qui font campagne contre les élevages de cochons « en terre d’islam ». Un moyen de sanctionner les chrétiens copte (10 % de la population) qui élèvent et consomment du porc. Pour les leaders de trois églises égyptiennes, l’élimination des porcs « vivants » est « barbare et impitoyable ». « Il faut se débarrasser des cochons de manière civilisée. L’animal a des droits, tout comme l’homme », a pour sa part affirmé, lundi, au quotidien Al-Masri Al Yom, le président du Parlement, Fathi Sorour.
La vidéo du massacre des porcs en Egypte
« Les cochons sont recouverts de produits chimiques, on les laisse pendant 30 à 40 minutes jusqu’à ce qu’ils meurent puis on les jette dans la fosse »
Dans la vidéo, Mohamed el-Mougharbil, le maire adjoint de Khassous, près du Caire, indique que des produits chimiques sont déversés sur les animaux entassés dans des camions provoquant lentement leur mort. « Les cochons sont recouverts de produits chimiques, on les laisse pendant 30 à 40 minutes jusqu’à ce qu’ils meurent puis on les jette dans la fosse », précise le chef de la décharge, Ali Chaabane. Des propos démentis par le ministère égyptien de l’agriculture. « Ce sont des désinfectants, les cochons sont égorgés avant d’être enterrés », a affirmé à l’AFP, le chef du département des maladies infectieuses, Saber Abdel Aziz Gala.
Pourtant, sur les images, les animaux jetés dans la chaux ne présentent aucune trace de sang. Dans son reportage, la journaliste de l’hebdomadaire égyptien Al-Ahram Hebdo, Heba Nasredine, corrobore l’avis de Saber Abdel Aziz Gala. Néanmoins elle note que « seuls les mâles sont tués conformément aux règles ». « Les petits porcs et les truies sont assommés avec une barre de fer et on les saigne jusqu’à ce qu’ils meurent dans les véhicules de leurs propriétaires », précise-t-elle.
Les éleveurs en difficultés
Les éleveurs souffrent de cette situation. Outre l’abattage de leurs porcs, ils se disent mécontents des indemnisations accordées par l’Etat. A titre d’exemple, pour un animal valide, la valeur de la compensation est de 100 livre égyptienne [1 livre égyptienne = 0,131 euros]]. « Un porc en bonne santé pèse entre 80 et 110 kg. Le prix du kilo nous revient à 5 livres égyptienne (L.E) et nous le vendons entre 12 et 15 L.E. Cela veut dire qu’avec de telles indemnisations, nous avons perdu de l’argent », explique, à Al-Ahram Hebdo, Guirguis, propriétaire d’une porcherie. Au delà de l’élimination des porcs, ce sont les éleveurs et les coptes qui sont le plus durement frappés par cette mesure. Comme le résume, l’écrivain marocain, Tahar Ben Jelloun, sur [Rue 89, « ils sont victimes de la grippe sans avoir été contaminés ».
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