L’annonce de la grève de la faim d’Ahmed Douma, un blogueur égyptien condamné à 6 mois de prison, par son avocat ce vendredi, secoue les partisans du jeune homme. Une condamnation vivement critiquée témoignant du quotidien difficile de nombreux activistes égyptiens réduits au silence.
Ahmed Douma passe à la vitesse supérieure. Condamné lundi 3 juin, à six mois de prison avec sursis et une amende de 600 euros pour avoir insulté le président égyptien Mohamed Morsi, le jeune bloggeur égyptien a entamé une grève de la faim pour protester contre sa détention.
La nouvelle sur sa grève de la faim a été donnée par son avocat Ali Souleymane, lequel a déclaré à l’agence Reuters que son client « n’est qu’un bouc émissaire ». « Mon client veut montrer que le procureur a commencé une campagne organisée pour emprisonner les militants avant le 30 juin ».
L’avocat ajoute également que son client a versé 5 000 livres (soit 550 euros) de caution en vue de sa libération. Son procès est en appel, mais il est accusé par le Parquet d’incitation à la violence lors de heurts en mars dernier devant le siège des Frères Musulmans.
Une importante figure révolutionnaire
L’arrestation d’Ahmed Douma suscite déjà une vague d’indignations. Des activistes de l’opposition égyptienne dénoncent le caractère politique de son arrestation. « Douma est une importante figure révolutionnaire », selon Malik Adly du Réseau Arabe pour les informations sur les droits de l’Homme. « En le ciblant, le procureur général ne fait qu’obtempérer aux ordres du gouvernement qui consistent à réduire l’opposition au silence », ajoute le militant.
Une condamnation qui n’a pas ébranlé la victime. Ahmed Douma reste confiant et fait même un signe du V (Victoire) à ses sympathisants lors de son procès au tribunal du Caire ce lundi, pendant que les activistes présents chantonnaient à coup d’applaudissements : « pourquoi le gouvernement a-t-il peur de toi, Douma ? ».
« On veut nous épuiser émotionnellement et physiquement »
La condamnation d’Ahmed Douma n’est-t-elle pas l’arbre qui cache la forêt dans un pays de plus en plus pointé du doigt pour non-respect du droit à l’expression ? Les arrestations sont de plus en plus fréquentes depuis l’arrivée au pouvoir des Frères musulmans, parti auquel appartient Mohamed Morsi. La société civile égyptienne reste inquiète.
Début avril, le célèbre présentateur et humoriste égyptien Bassem Youssef s’était lui aussi heurté à la justice du pays. Le Parquet avait décidé d’examiner des plaintes contre lui pour « menaces à la sécurité publique ».
Bassem Youssef avait été accusé d’avoir insulté l’Islam et le président Morsi et d’avoir propagé des rumeurs, des fausses informations et troublé l’ordre public après les derniers événements. « J’ai l’impression qu’on veut nous épuiser émotionnellement et physiquement », avait fait savoir l’humoriste devant les médias internationaux.
Mercredi dernier, le secrétaire général des Nations-Unies, Ban ki-Moon, a souligné l’ « importance critique » de la liberté d’association et d’expression en Egypte. Il a aussi appelé, à travers un communiqué, à plus d’efforts pour faciliter le travail aux ONG sur place. « Le secrétaire-général des Nations-Unies se préoccupe de l’arrestation et de la condamnation de nombreux employés locaux et étrangers d’ONG ce mardi 4 juin. Le verdict rendu à leur encontre montre que la société civile est strictement limitée dans ce pays ».