Durant l’été 2011, le Legatum Institute et la Fondation Carnegie ont convié une équipe d’économistes et d’experts en transition au niveau international à passer plusieurs jours en Égypte. Le groupe de travail a rencontré au début du mois de juin au Caire des dirigeants d’entreprise, des hommes politiques, des économistes, des spécialistes de l’aide internationale, et des diplomates américains et européens, entre autres. Le but de cette visite était d’écouter et d’apprendre de ceux qui sont les mieux placés pour offrir leurs commentaires sur divers aspects de la transition démocratique de l’Égypte.
La révolution égyptienne est un tournant qui sera célébré en tant que tel. Dans les mois et les années à venir, le futur du pays sera décidé par les égyptiens eux-mêmes, bien sûr. Mais la communauté internationale a un intérêt à ce que l’Égypte se dote d’une société stable, démocratique et prospère. Et elle a un rôle à jouer. L’Égypte est d’une importance stratégique vitale pour toute la région. Le pays a été, avec la Tunisie, au départ du printemps arabe. Si l’Égypte échoue, l’effet de cet échec se répercutera à travers tout le Moyen-Orient.
Le rapport issu de ces rencontres du Caire, intitulé : Égypte : Cinq mythes à propos de l’économie et de l’assistance internationale disponible à cette adresse, constitue une évaluation indépendante de certains des défis auxquels les égyptiens doivent faire face aujourd’hui. Nous nous sommes concentrés sur l’économie et la question de l’aide internationale. Si la réforme politique se doit de réussir, nous croyons que le nouveau leadership de l’Égypte se jouera sur le front économique. Quelle est la situation actuelle? Quelles réformes sont désormais économiquement nécessaires? Qu’est-ce qui est politiquement réalisable? Comment les acteurs externes peuvent-ils apporter leur aide ? Comment ceux d’entre nous engagés dans l’avenir démocratique de l’Égypte peuvent-ils éviter de nuire?
Nous espérons que ce rapport pourra contribuer au débat, en écartant au moins cinq mythes :
Mythe n° 1 : « L’économie de l’Égypte est un cas désespéré ». Cela est faux. L’économie égyptienne est solide et diversifiée, et elle a connu des taux de croissance économique tout à fait honorables avant la révolution. Pourvu que le prochain gouvernement élu s’engage à améliorer l’environnement des affaires et à redresser le déficit budgétaire, il n’y a aucune raison que l’Égypte ne se développe pas rapidement à nouveau.
Mythe n°2 :« Il est temps de se concentrer sur la politique, les réformes politiques peuvent attendre ». Cela est encore faux. Pour que la transition vers la démocratie soit un succès, les égyptiens doivent créer les conditions de la croissance économique et de finances publiques viables. Cela exige des réformes, sans attendre.
Mythe n°3 : « Les principaux problèmes budgétaires, comme les subventions, ne pourront être traités rapidement ». Cela est faux. À tout le moins, les subventions aux carburants peuvent, et doivent, être éliminées. Les subventions sont inefficaces, régressives, et représentent un énorme fardeau pour les finances publiques du pays. S’il ne s’attaque pas au problème des subventions, le pays se dirigera vers une crise économique profonde.
Mythe n°4 : « Le gouvernement égyptien a besoin d’un soutien budgétaire en urgence ». Apparemment pas : le gouvernement égyptien a déjà rejeté des prêts bonifiés du FMI et de la Banque mondiale et cherchera plutôt à limiter ses dépenses et recevoir des fonds en provenance de pays arabes. Donner au gouvernement plus d’argent aujourd’hui n’affectera vraisemblablement pas la transition de manière significative. Au lieu de cela, des moyens doivent être trouvés pour canaliser l’aide par le biais d’investissements directs dans le secteur privé, des Partenariats Public-Privé en matière d’infrastructures, ainsi que par le biais de la société civile.
Mythe n° 5 : « La communauté internationale a fait tout ce qu’elle a pu pour aider à la transition » Faux là encore. Les Etats-Unis, l’Union européenne et d’autres acteurs extérieurs peuvent et doivent faire bien davantage pour inciter et soutenir les réformes économiques, qui, à leur tour, soutiendront la transition politique vers la démocratie. Nous devrions encourager le commerce et l’investissement privé. Des formes spécifiques d’aide qui peuvent faciliter des initiatives locales de développement et renforcer les institutions de la société civile pourraient avoir un impact durable.
Les co-présidents de ce Projet Égypte sont Michele Dunne, Directrice du Rafic Hariri Center for the Middle-East, Conseil de l’Atlantique (Washington, DC) et Jeffrey Gedmin, Président et CEO du Legatum Institute (Londres). Les Membres de l’équipe sont Marek Dabrowski, Centre de recherche économique et sociale (Varsovie), Uri Dadush, Carnegie Endowment for International Peace (Washington, DC), Hafez Ghanem, FAO, ONU (Rome), Mara Revkin, Rafic Hariri Center for the Middle-East, Atlantic Council (Washington, DC), Dalibor Rohac, Legatum Institute (Londres), Dessy Roussanova, International Alert (Londres), Michal Safianik, Communauté des démocraties (Varsovie), et Tarik Yousef, Dubaï School of Government.
Ce rapport a été publié originellement en anglais et est disponible à cette adresse.
Publié en collaboration avec www.UnMondeLibre.org.