Egypte : « Carton rouge » pour Mohamed Morsi !


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Plus d’un million de manifestants sont attendus pour défiler ce vendredi contre le pouvoir dans la capitale égyptienne, Le Caire. Dans son allocution télévisée de ce jeudi soir, Mohamed Morsi a appelé les différentes composantes de la société, dont l’opposition et des porte-paroles des manifestants, à se réunir samedi pour conclure d’un commun-accord. Les manifestations pro et anti-Morsi paralysent le pays depuis le 22 novembre, date à laquelle Mohamed Morsi a considérablement renforcé ses pouvoirs. Qu’ont pensé les Egyptiens des propositions de leur président ? Reportage au Caire, à travers l’œil de Faïrouz Abou el Wafa, une habitante de la capitale égyptienne.

Le discours à la nation prononcé ce jeudi soir par le président égyptien Mohamed Morsi n’a pas convaincu. Il a appelé l’opposition et les porte-paroles des manifestants à se réunir samedi matin à 8 heures pour trouver un accord. « Depuis quinze jours maintenant, mon équipe et moi-même travaillons sans relâche pour le peuple égyptien », a déclaré Mohamed Morsi. Il a accusé l’opposition de vouloir saccager son travail. « Nous allons réprimer toutes les personnes qui commettent des actes de vandalisme », a-t-il affirmé.

Au total, sept personnes ont perdu la vie cette semaine dans les manifestations, et 771 personnes ont été blessées. Selon des porte-paroles de la présidence présents à la grande prière de ce vendredi à la mosquée Al-Azhar, « la plupart des morts et des blessés sont des manifestants pro-Morsi ». Pour Faïrouz Abou el Wafa, une habitante du Caire, toutes ces déclarations ne sont que manipulation. Selon elle, Mohamed Morsi doit, pour calmer la crise, renoncer au décret controversé et au référendum du 15 décembre sur le projet de Constitution.

La manifestation du « carton rouge »

Alors que le nouveau « Pharaon » s’adresse au peuple, certains sirotent leur thé, chichas à la main, sur les terrasses des cafés de la capitale. Le mari de Faïrouz est assis à l’une d’entre elles, en compagnie de ses amis, dans leur quartier. « Vous ne suivez pas le discours du président ? », interroge-t-elle. « Nous n’avons pas envie de l’écouter (Mohamed Morsi), ni même de le voir. C’est un menteur ! », s’exclame Abdallah, le mari de Faïrouz. « Pourtant, il a proposé aux Egyptiens et à l’opposition de se réunir samedi matin pour trouver une issue à la crise », poursuit-elle. Abdallah et ses amis éclatent de rire : « Pourquoi attendre samedi ? Pourquoi ne pas faire cela maintenant ? Son discours a été préparé uniquement pour calmer d’avance la grande manifestation de vendredi ! Morsi va prendre un carton rouge ! », s’écrie le groupe d’amis. Abdallah en est convaincu, Mohamed Morsi ne fera pas long feu à la tête du pays.

Plus d’un million d’Egyptiens sont attendus ce vendredi à l’occasion d’une manifestation appelée « carton rouge (pour Morsi) ». Les militaires se sont déployés aux abords du palais présidentiel, le palais El-Oruba situé dans le quartier cossu d’Héliopolis. Car malgré l’interdiction de se rassembler devant le palais, la présidence en est consciente. Dans quelques minutes, des milliers et des milliers d’Egyptiens marcheront une nouvelle fois vers El-Oruba.

« Les Egyptiens en ont vraiment marre. Jama3at el ikhoin el muslimin (les Frères musulmans, ndlr) avaient envoyé les leurs pendant le soulèvement contre Moubarak uniquement pour avoir leur place dans la société égyptienne. Quand Moubarak est tombé ils sont passés à l’action et ont réussi leur coup, indique Abdallah. Leur but n’était pas de faire la révolution mais de s’emparer du pouvoir, leur unique but. Mais ce n’est pas parce que Morsi est désormais président qu’il fera ce qu’il veut ». Fin de la conversation. Faïrouz regagne, soucieuse, le domicile conjugal dans le quartier de Madinat Nasr.

La Salat Janaza (la prière du mort) des sept manifestants tués vient de toucher à sa fin. Les corps sont transportés dans des cercueils à l’extérieur de la mosquée Al-Azhar. De quoi chauffer les esprits des milliers de personnes rassemblés autour du célèbre lieu de culte. L’ambiance est très tendue. Dans peu de temps, tous se dirigeront vers le palais d’El-Oruba et vers la place Tahrir, accompagné du fameux slogan : « Al cha3b youreed isqat al nidham » (le peuple veut la chute du régime, ndlr). Dans quelles conditions se dérouleront les évènements de ce vendredi ? Mohamed Morsi tiendra-t-il tête encore longtemps face à la colère de la rue ?

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