La journée mondiale de la lutte contre la drogue est l’occasion pour l’Algérie de faire un point sur sa situation. Le constat est alarmant. Le trafic de drogue prend de plus en plus d’ampleur dans un pays où 20% des jeunes se droguent.
A l’occasion de la journée mondiale de la lutte contre la drogue, l’Algérie fait ses comptes. Le bilan est lourd, plus de 300 personnes meurent chaque année des méfaits de la drogue ! La Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) révèle dans ses statistiques que 23% des individus arrêtés en Algérie le sont pour trafic de stupéfiant. Ces individus sont âgés en moyenne de 35 ans.
Les régions frontalières sont les plus touchées par le phénomène. A Tamanrasset, au sud de l’Algérie, près de 47 affaires liées au trafic de drogue ont été élucidées durant le premier trimestre de 2013. En termes de chiffres, cela représente une saisie de 6254 kg de résine de cannabis, 7320 kg de bango et 49 060 comprimés de psychotrope.
Dans un même temps, 76 personnes au total ont été arrêtées dont 28 ressortissants étrangers. L’évolution du trafic de drogue va de mal en pis puisqu’en 2012, les saisies ont été moindres : 5502 kg de résine de cannabis, 4329 kg de bango et 803 comprimés de psychotrope. Réputée « paisible », la wilaya de Tamanrasset regorge pourtant de drogue. D’autres chiffres, en juin 2013, la brigade de lutte contre le trafic de stupéfiants de la wilaya de Tamanrasset ont saisi 256 527 comprimés de psychotropes et la somme de 220 500 DA, un peu plus de 2100 d’euros.
Pas plus tard que le 24 juin, les services de sécurité de la wilaya de Biskra, situé à 400 km au sud-est d’Alger, ont démantelé un autre réseau de trafiquants de drogue. Cinq individus ont été arrêtés tandis que deux autres sont activement recherchés, d’après les services de la Sûreté de la wilaya de Biskra, selon l’APS.
Medelci incrimine le Maroc
En visite de travail à Moscou, le ministre algérien des Affaires étrangères, Mourad Medelci, a fait un point bref sur les importantes quantités de drogue saisies dans son pays. Il n’a pas manqué de citer le Maroc comme exportateur direct de cannabis, notamment en Algérie, lors d’une interview accordée à une chaîne de télévision russe. Et à raison, car le Maroc, pays frontalier avec l’Algérie, est l’une des plaques tournantes du trafic de cannabis les plus importantes au monde. Dans la région du Rif, le kif se cultive de manière décomplexée. Il s’agit même d’un métier, malgré la lutte timide de l’Etat marocain à empêcher l’essor de ce business. Il a également précisé que d’importantes quantités de drogue en provenance du Maroc sont régulièrement saisies par les forces de sécurité algériennes.
Les accusations de Medelci ne sont pas passées inaperçues dans le royaume. Le journal en ligne Lemag, anciennement Emarrakech, réputée pro-monarchie, a fustigé les propos de Medelci. Le journal électronique qui ne manque une occasion de redorer le blason du palais, s’est ouvertement livré à une mini guerre contre le ministre algérien. Dans son analyse de quatre paragraphes de trois lignes, Lemag a jugé nécessaire d’évoquer le « trafic de psychotropes » qu’organise le « régime petro-militaire » (l’Algérie, ndlr) vers le Maroc.
L’arrivée depuis quelques années des comprimés psychotropes sur le marché marocain est effectivement un phénomène grave. Ces gélules, comme toutes les autres formes de drogue, nuisent gravement à la santé. Mais plutôt que de conclure un court chapitre avec ce genre d’affirmation, Lemag aurait certainement dû pousser la recherche et l’analyse encore plus loin et construire un dossier complet sur le trafic de drogue en Algérie et au Maroc avec l’objectivité la plus totale. Le cas échéant, ce genre de polémique stérile ne fait qu’accentuer la complication des relations entre les deux pays « frères ». Pourtant, le Maroc réclame depuis quelques temps déjà la réouverture des frontières. Une demande à laquelle l’Algérie ne semble pas encore prête à y donner une suite favorable.
20% des jeunes se droguent
Des acteurs de la société civile algérienne ont saisi l’occasion de cette journée mondiale de la lutte contre la drogue pour rappeler qu’une caravane nationale de lutte et de sensibilisation contre la drogue, à l’initiative des anciens scouts musulmans algériens, sillonne le pays depuis plus de quatre mois. D’après Mustapha Saâdoune, responsable de l’association, « la caravane a sillonné 40 wilayas, drainé plus de 300 jeunes animateurs et sensibilisé plus de 3 millions de citoyens ». Les chiffres sont encourageants, mais l’initiative suffira-t-elle à freiner le fléau de la drogue en Algérie ? Aux frontières du Sahel où les plus importantes filières du narcotrafic en Afrique ont élu domicile…
En Algérie, 20% des jeunes se droguent selon les chiffres des cellules d’écoute et de l’action préventive. Un désastre dans un pays où beaucoup de jeunes sont en mal de vivre…