Donner un sens politique à la révolte nationale


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Drapeau de l'Algérie
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Le principal parti d’opposition algérien, le Front des forces socialistes, cesse de boycotter les élections. Il accepte de se présenter aux municipales d’octobre prochain, mais assortit sa participation de six conditions imposées au pouvoir. Interview de Ikhelf Bouaichi, premier secrétaire par intérim du parti.

Afrik : Après avoir boycotté les législatives de mai dernier, pourquoi avez-vous décidé de vous présenter aux municipales du 10 octobre prochain ?

Ikhlef Bouaichi : Les élections législatives et municipales ne sont tout simplement pas de même nature. La députation est un mandat national. Les députés sont au service du pouvoir et sont loin des préoccupations de la population. Alors que les municipales la concernent directement. Le peuple est lié à ses élus car ce sont eux qui règlent les problèmes de la vie quotidienne.

Afrik : Est-ce là la seule raison pour laquelle vous vous présentez ?

Ikhlef Bouaichi : Non. Nous sommes devant une situation très dangereuse pour le pays et devant un pouvoir sourd et aveugle aux revendications de la population. En tant que parti de gauche, nous avons le devoir politique et moral d’être aux côtés de ceux qui ont organisé la dissidence citoyenne. Nous devons avoir des élus pour être à l’écoute de la population et donner un sens politique à tous ces mouvements de révolte. Nous ne pouvons pas laisser la population seule en face du pouvoir et de son appareil répressif. Cela mènerait le pays au chaos.

Afrik : Vous avez assorti votre participation de conditions que vous avez soumis au pouvoir, quelles sont-elles exactement ?

Ikhlef Bouaichi : La libération immédiate et inconditionnelle de l’ensemble des détenus du mouvement citoyen, ce à quoi le pouvoir a souscrit hier (tous les détenus du mouvement citoyen ont bénéficié, lundi, d’une grâce présidentielle du président Abdelaziz Bouteflika, ndlr). L’arrêt des provocations et des répressions contre la population sur tout le territoire national. La levée du dispositif d’exception répressif en Kabylie. La libération des espaces politiques pour favoriser le débat politique. La levée des entraves concernant la presse. Et l’arrêt du harcèlement judiciaire des élus et notamment ceux du FFS, sous contrôle judiciaire depuis leur refus de participer à la préparation du scrutin législatif du 30 mai dernier.

Afrik : Ces conditions ne sont-elles pas un peu trop draconiennes pour le pouvoir ?

Ikhlef Bouaichi : C’est le minimum des actions urgentes à réaliser dans le contexte actuel pour retrouver une sérénité et un apaisement national afin de discuter des problèmes de fond. De manière plus structurelle, nous avons établi et consigné l’ensemble des décisions, mécanismes et conditions politiques nécessaires à un règlement définitif de la crise algérienne dans un mémorandum que nous avons remis le 12 mai 2001 aux politiques.

Afrik : Vous avez laissé entendre que si vos conditions n’étaient pas respectées vous pourriez quitter à n’importe quel moment le processus électoral.

Ikhlef Bouaichi : Ce sont pour nous les mesures minimales. Si elles ne sont pas respectées, il n’y a plus rien à faire. Le pouvoir devra prendre ses responsabilités et en assumer seul les conséquences.

Afrik : Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) regrette que vous n’ayez pas proposé dans vos conditions le jugement des responsables de la mort des jeunes manifestants en Kabylie. Qu’en pensez-vous ?

Ikhlef Bouaichi : Ce qui nous intéresse ce sont les mesures d’apaisement. Nous ne voulons pas que l’émeute soit érigée en pratique politique, nous souhaitons réhabiliter le débat. Chaque parti a ses priorités et ses propres démarches pour les réaliser. Si le RCD estime qu’il y a d’autres priorités, qu’il les soumette au pouvoir, personne ne l’en empêche.

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