Le discours de Nicolas Sarkozy à Dakar, en juillet, a entraîné de vives critiques sur le continent africain. Cette semaine, Jean François Bockel, secrétaire d’Etat à la francophonie, prend la défense de son président. Mais l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin ne cautionne pas les propos du chef de l’Etat et appelle à la prudence.
« Le discours de Dakar » prononcé par le Président Sarkozy, le 29 juillet dernier, a fait couler beaucoup d’encre en Afrique. Cette semaine, c’est Jean François Bockel, secrétaire d’Etat à la francophonie, qui monte au créneau et défend son nouveau mentor. La première bonne nouvelle, affirme-t-il, dans une tribune publiée mardi dans Le Figaro, est que ce discours suscite le débat et met à nouveau l’Afrique à l’ordre du jour. Bockel eût-il raison, il serait regrettable de devoir attendre l’allocution d’un président français pour que le continent noir fasse l’actualité…
Un « témoignage de respect »?
M. Bockel se demande ce qui est reproché à Nicolas Sarkozy. Ce n’est pas, comme il le sous-entend, d’avoir nié la « responsabilité du colonisateur » ou celle de la France dans l’esclavage et la traite négrière, mais de se poser en donneur de leçons. Une position qu’a reprise le secrétaire d’Etat à la francophonie dans sa tribune : « il faut que cesse, comme l’a rappelé le président, l’arbitraire, la corruption, la violence »
Pour M. Bockel, l’allocution de Dakar s’apparente à un « témoignage de respect », un « message volontariste et responsable » et est « en phase avec les aspirations les plus profondes du continent africain ». Le secrétaire d’Etat appelle à l’union de la France et du continent africain afin de « mieux réguler la mondialisation » et « construire la croissance de manière durable ». Il affirme que le message essentiel du discours tient en une phrase : « L’avenir de l’Afrique appartient d’abord aux Africains ». Mais de la lecture des propos du chef d’Etat français, il ressort que les aspirations des Africains n’ont pas été évoquées. Si ce discours a tant suscité de réactions, c’est aussi parce que Sarkozy n’a rien proposé. Le vrai débat politique et économique n’a pas eu lieu. Et il semble qu’on en attendait un peu plus de celui qui se dit l’homme de la « rupture. »
De Villepin à l’attaque
Dominique de Villepin, ancien Premier ministre français, s’oppose aux allégations tenues à Dakar par l’actuel Président français. « Je suis critique vis-à-vis de la politique africaine de Nicolas Sarkozy », a-t-il indiqué ce lundi, au micro de la radio Europe 1. Il a appelé à « tenir compte des réalités et des sensibilités », réaffirmant son désaccord concernant certains propos « tenus à Dakar sur l’homme africain qui n’entrerait pas suffisamment dans l’avenir ». L’ex-Premier ministre de Jacques Chirac a rappelé les efforts de ce dernier notamment avec la construction du Musée du Quai Branly précisant que « Nous sommes le pays qui (…) comprend sans doute le mieux aujourd’hui l’Afrique et l’aime le plus ».
De toute évidence, M. De Villepin ne paraît pas cautionner les propos du 26 juillet dernier. Et d’ajouter : « veillons à ne pas adresser des contre signaux à partir d’interprétations qui sont éminemment discutables ». Preuve qu’au sein de la même classe politique,- il faut tenir compte, bien sûr, des désaccords et intérêts de chacun – Nicolas Sarkozy a déçu, voire choqué, faisant du stéréotype et du cliché la ligne directrice de son discours. Ainsi déclarait-il, à Dakar, devant une assistance médusée : « Le paysan africain, qui depuis des millénaires, vit avec les saisons, dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature, ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles » avant de souligner que « dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine, ni pour l’idée de progrès… »