Diasporas : briser les murs de solitude de l’Afrodescendance


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Pour exprimer les différences qui divisent les anglophones et les francophones au Canada, on a l’habitude d’utiliser l’expression « les deux solitudes ». Les Afrodescendants d’Amérique Latine descendants des esclaves africains qui ont pour langue officielle le Portugais et l’Espagnol principalement, représentent une et même plusieurs des solitudes que l’on trouve au sein du Monde Noir.

Les sites internet spécialisés qui abordent des thèmes historiques ou d’actualité liés aux Afrodescendants d’Amérique Latine sont soit rares, soit trop spécialisés et ancrés sur le folklore, ou encore présentent des informations majoritairement et uniquement publiées en Espagnol ou en Portugais. L’indisponibilité ou l’extrême rareté des sujets de la vie quotidienne de ces afrodescendants dans la langue de l’autre, par exemple le français, constitue une barrière, un mur qui empêche la (re)connexion, le partage, l’échange. La langue de l’un est la barrière qui l’empêche d’accéder au quotidien ou à l’histoire de l’autre. Et ceci est particulièrement vrai pour l’Africain ou l’afrodescendant francophone vis-à-vis de l’Afrodescendant d’Amérique Latine dont nous parlons spécifiquement ici.

Ces derniers qui parlent majoritairement le Portugais et l’Espagnol ne peuvent par conséquent pas se croiser automatiquement avec la majorité des africains par exemple (ou des antillais francophones ou anglophones) qui parlent principalement l’Anglais et le Français. On peut aisément faire ce constat en analysant et en comparant les langues officielles dans les deux continents et la proportion de la population qui les parle.

Les langues des colons et des esclavagistes européens n’ont donc pas seulement été le véhicule pour nous transmettre et essayer de nous faire ingurgiter une culture qui n’est pas la nôtre. Elles sont également de nos jours à l’origine des solitudes afrodescendantes, c’est-à-dire cet isolement, ce cloisonnement linguistique, politique, culturel, plus ou moins important qui caractérise chaque communauté de la diaspora africaine, et particulièrement celle d’Amérique Ibérique.

C’est d’ailleurs également le cas en Afrique même où les réalités des francophones sont loin de toujours préoccuper les anglophones. Ce cloisonnement, boosté par les différences de langue a non seulement un impact au niveau de l’accès de l’un à l’information au sujet de l’autre, mais également du point de vue de l’échange ou de la connexion sociale, touristique, politique, économique, culturelle, éducationnelle, etc.

Des initiatives sont donc à mettre en œuvre, de part et d’autres (par les africains et leur diaspora) pour permettre aux afrodescendants et aux africains d’élargir leur horizon en termes de références qui leur ressemblent, qui seraient une source de fierté, des modèles. Cela n’est possible que si l’on ouvre le cadenas linguistique qui rend les uns invisibles, inexistants pour les autres.

Le rôle des communicateurs, journalistes, traducteurs, linguistes est ici primordial. Ce sont eux qui peuvent créer cet intérêt au niveau des populations (et non seulement des experts). C’est dans ce sens qu’est née l’initiative depuis deux ans du blog des Noirs d’Amérique Latine. Il s’agit, par le biais de traductions d’articles de l’Espagnol et du Portugais vers le français de mettre à la disposition principalement (mais pas exclusivement) des afrodescendants francophones des informations historiques et d’actualité de tout ordre sur les afrodescendants d’Amérique Latine. Le temps a permis de se rendre compte qu’un grand intérêt existe, du grand public et de nombreux intellectuels. Cependant, cette initiative qui va se poursuivre et grandir n’est qu’un grain de sable parmi des millions d’autres grains de sable de possibilités.

La collaboration qui débute avec la revue Caoba rentre dans cette perspective. Chacun de nous, africain, afrodescendant de la diaspora qui partage le même idéal d’échange au sein du Monde Noir a sa part à faire.

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