Le Salon international de l’artisanat de Ouagadougou a accueilli en 2004, pour la première fois depuis son existence, une exposition de design africain. « Design, made in Africa ». Le Siao a fermé ses portes, mais l’exposition va sillonner l’Afrique et le monde jusqu’en 2006. Après un passage à la biennale du design de Saint-Etienne, voilà deux semaines, elle fait halte à Paris depuis mercredi.
« Design, made in Africa ». C’est le nom d’une exposition à laquelle un pavillon entier a été consacré lors du dernier Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (Siao). Le Siao a fermé ses portes, mais l’exposition, conçue en doublon, continue de sillonner l’Afrique et le reste du monde. Une quarantaine de villes vont la recevoir d’ici la fin de l’année 2006. Les créations de trente artistes, provenant de quatorze pays, sont présentées dans cette discipline rare en Afrique. « Design made in Africa » a été réalisée en partenariat avec l’Agence française d’action artistique (Afaa) et la biennale de design de Saint-Etienne, après deux ans de demandes pressantes de Jean-Claude Bouda, le directeur du Siao. De fait, c’est « un rêve » que celui-ci affirmait voir se réaliser lors de l’inauguration du pavillon, le 2 novembre dernier.
L’attaché culturel à l’ambassade de France, également présent lors de l’inauguration, a tenu à expliquer pourquoi c’est la langue anglaise qui a été choisie pour baptiser l’exposition. « A la veille du sommet de la francophonie à Ouagadougou ! » qui plus est. « D’abord car elle a une vocation internationale. Mais également parce qu’au Nigeria, certains artisans sont obligés de coudre une étiquette « made in Japan » sur leurs produits, afin que ceux-ci aient une chance d’être vendus à l’étranger. Ce qui représente une humiliation pour eux. » Alors, espère l’attaché culturel, « qu’un peu d’honneur leurs soit rendu à travers l’exposition ».
Réinventer l’artisanat
Des chaises, des lits, des tables, des services de table… ce sont tous les objets de la vie quotidienne qui sont remis au goût du jour dans « Design, made in Africa ». Il en est ainsi du « Design à terre » du Togolais Kossi Assou, qui réinvente le « salon assis ». Son œuvre est composée de six « sièges », en réalité des planches d’Iroko massif teintées d’ébène, disposées en cercle autour d’un plateau central fait du même matériau. Pour y manger, le Malien Cheick Diallo a composé une coupe à fruits en céramique blanche, entreposée sur un petit caisson de cordes de coton teintées en noir. Et si le plateau de Kossi Assou vous paraît trop bas, vous pourrez porter votre choix sur la table noire que Cheick Diallo a réalisé avec la même technique de la corde tressée.
Le siège des sud-africains Carlo Gibson et Zimek Pater (« Strangelove »), les pieds et accoudoirs en bois, ondulés, parés d’une revêtement en jersey, dégradé du marron à l’orange, vous laissera apprécier un repos mérité. A ne pas manquer, également, « Soundiata », un meuble à sept tiroirs réalisé par le Burkinabé Ahmed Ouattara. Une sorte d’obus noir de 130 cm, brillant et massif, posé à la verticale sur trois pieds qui lui donnent l’aspect d’un vaisseau extra-terrestre. Le tout est composé de tôle noire et de poêles à frire artisanales soudées. Des dizaines d’autres objets plus beaux les uns que les autres participent dans cette exposition à un rafraîchissement de l’artisanat africain.
Ancrer le design en Afrique
Jean-Claude Bouda parlait du « pavillon du design » comme d’un rêve. Mais un rêve qu’il souhaitait voir se perpétuer. Or, estime le président d’honneur de l’exposition, Samuel Sidibé, « le métier de designer, à quelques exceptions près, n’est pas reconnu comme tel en Afrique ». D’autre part, « les conditions de l’existence du design, c’est à dire les lieux et occasions de rencontres entre « créateurs, éditeurs et distributeurs », y sont rarement réunies, « sauf probablement en Afrique du Sud ».
C’est notamment cette fonction que l’exposition compte remplir lors de ses pérégrinations en Afrique. Il s’agira alors, « dans chaque ville d’accueil sur le continent africain, de créer localement les conditions d’émergence de véritables situations de design », explique le Commissaire de l’exposition, Michel Bouisson, dans le catalogue de l’exposition. Dans chaque ville étape, seront organisés en partenariat avec l’Association des designers africains (Ada) des Ateliers-Résidences, des work-shops, où seront réunis producteurs, designers et diffuseurs. Le résultat de ces rencontres « viendra se greffer à l’exposition, et, espère le Commissaire, lui donner en permanence une nouvelle actualité ».
Exposition « Design, made in Africa » : jusqu’au 10 décembre 2004, Hôtel Mercure, Paris Tour Eiffel Suffren