À l’heure où 77% des Africains n’ont toujours pas accès aux traitements contre le VIH, le paludisme ou la tuberculose, certains pays d’Afrique comme le Cameroun et le Gabon se mobilisent. Soutenus par l’Union Africaine, ils tentent de développer la production des médicaments génériques sur le continent. Beaucoup moins chers que les médicaments de marque, ils deviendraient alors accessibles au plus grand nombre.
Des médicaments pour tous ! C’est le projet ambitieux des professionnels de la santé africains qui souhaitent développer la production de médicaments génériques sur le continent. 90% des produits pharmaceutiques utilisés en Afrique sont issus de l’importation et de l’aide internationale. Un chiffre qui révèle l’urgence de la situation.
« Les approvisionnements en médicaments génériques se font majoritairement en Asie et plus particulièrement en Inde. Il y a quelques initiatives locales mais elles ne sont pas suffisantes », explique Clotaire Manga, pharmacien et responsable du centre de documentation et d’information sur le médicament au Burkina Faso. Concevoir des médicaments adaptés aux besoins locaux en matière de santé publique est donc devenu la priorité de certains pays comme le Kenya, le Nigeria, l’Afrique du Sud et la Tanzanie, rapporte Afrique Avenir.
Après celle érigée à Libreville au Gabon en 2005, c’est à Douala, capitale économique du Cameroun, qu’une usine de fabrication de médicaments génériques a été inaugurée par le ministre camerounais de la Santé publique, André Mama Fouda, le jeudi 8 avril dernier. La Compagnie industrielle pharmaceutique (Cinpharm), qui a coûté près de 11 milliards de Fcfa, a largement bénéficié du soutien du gouvernement camerounais, mais aussi de l’aide financière de l’Inde et de la Finlande, indique Cameroon-report. « C’était indispensable étant donné le contexte actuel au Cameroun. Aujourd’hui, ce sont 217 000 personnes qui ont besoin d’un traitement contre le sida. C’est donc un avantage énorme de pouvoir fabriquer ces médicaments sur place afin de les rendre accessibles au plus grand nombre », explique Bertrand Kampoer, responsable du Mouvement camerounais pour le plaidoyer et l’accès au traitement. Cette usine devrait, d’ici peu, être en mesure de produire quantité d’antipaludéens, d’antalgiques, d’antiviraux, d’anti-inflammatoires et d’antibiotiques en tout genre.
L’UA s’engage pour la santé publique
70 à 90% moins onéreux que des médicaments de marque, ces médicaments génériques devraient permettre à une grande partie de la population africaine de se soigner correctement. « Les médicaments génériques sont indispensables en Afrique où il ya un véritable problème de pouvoir d’achat. Les Africains n’ont pas les moyens de dépenser des sommes considérables pour se soigner », relate Clotaire Manga. Cet objectif santé est salué par la totalité des pays du continent et vivement soutenu par l’Union Africaine. En janvier 2005, les 55 pays membres de l’UA se sont réunis pour signer la Déclaration d’Abuja, soutenant le développement d’un plan de l’innovation pharmaceutique en Afrique.
Mais qui dit usines pharmaceutiques, dit personnel qualifié. Une évidence qui va obliger le continent à investir dans la formation de scientifiques compétents. « Il est nécessaire d’avoir des produits de qualité qui répondent aux normes fixées par l’OMS. Il arrive qu’elles ne soient pas respectées et cela peut comporter un vrai risque pour le patient. Soit le traitement ne sera pas efficace, soit il représentera des risques toxiques », explique Audrey Vermeersch, pharmacien référent au siège de Médecins sans frontières. Biologistes, chimistes, médecins, et cliniciens expérimentés sont attendus avec impatience pour mener à bien cette initiative.