
Une délégation de juristes espagnols a été expulsée du Sahara occidental par les autorités marocaines, alors qu’ils s’apprêtaient à enquêter sur la situation des droits de l’homme dans ce territoire. Les membres de la délégation, qui comprenaient les avocates Dolores Travieso Darias et Flora Moreno Ramos, ainsi que le technicien Silvestre Suárez Fernández, ont été empêchés de quitter l’avion à leur arrivée à Laâyoune, capitale du Sahara occidental sous contrôle marocain. Cette expulsion intervient dans un contexte diplomatique tendu entre le Maroc et certaines institutions européennes.
À leur arrivée à Laâyoune, samedi 15 mars,les trois Espagnols ont été interdits de descendre de l’avion alors que les autres passagers prenaient pied sur le sol marocain. Des hommes en civil, apparemment des agents des autorités locales, sont montés à bord de l’appareil et ont ordonné à la délégation espagnole de rester à bord sans fournir d’explications claires. Inés Miranda Navarro, membre de l’Association internationale des juristes pour le Sahara occidental (AIJUWS), qui faisait également partie du groupe. Elle a expliqué que les autorités marocaines ont persisté dans leur décision de renvoyer les juristes vers les îles Canaries.
Mandat pour enquêter sur les droits humains
L’objectif de cette mission était de se rendre sur le terrain pour évaluer la situation des « prisonniers politiques » sahraouis détenus dans les prisons marocaines. Selon Inés Miranda Navarro, cette expulsion constitue une violation flagrante du droit international, en particulier du droit à la liberté de circulation des personnes et des conventions de Genève relatives au Sahara occidental. Les juristes espagnols avaient également prévu de rencontrer des responsables d’organisations de défense des droits humains locales.
Cet incident intervient dans un contexte de tensions diplomatiques entre le Maroc et certains responsables européens. En effet, ce n’est pas la première fois que les autorités marocaines empêchent des Européens d’entrer dans le Sahara occidental. Le 2 mars dernier, le Maroc avait déjà expulsé un responsable de la Confédération générale du travail (CGT) espagnole de Dakhla, une autre ville située dans le Sahara marocain.
Question de la souveraineté le Sahara occidental
Le Maroc justifie ces expulsions en soulignant qu’elles s’inscrivent dans le cadre de la protection de sa souveraineté nationale. Selon les autorités marocaines, les personnes concernées auraient tenté d’utiliser leur statut parlementaire pour promouvoir des thèses séparatistes, en violation des règles encadrant les visites officielles. Le royaume chérifien a réaffirmé, à plusieurs reprises, que la sur question de la souveraineté le Sahara occidental est une « ligne rouge » et que toute ingérence étrangère, notamment dans le cadre de la défense de thèses séparatistes, serait fermement rejetée.
Cette ligne dure est également apparue lors de l’interdiction, le 20 février, d’accès à Laâyoune pour trois députés européens : l’Espagnole Isa Serra, le Finlandais Jussi Saramo et la Portugaise Catarina Martins. Ces parlementaires avaient prévu de rencontrer des associations locales de défense des droits de l’homme. À la fin du mois de janvier, trois membres du Parlement basque avaient également été expulsés du territoire marocain alors qu’ils souhaitaient, eux aussi, rencontrer des défenseurs des droits humains à Laâyoune.
Une crise diplomatique en gestation
Le Maroc considère que ces actions sont en dehors des canaux diplomatiques appropriés et qu’elles tentent d’exploiter la position de représentants élus pour mener des démarches incompatibles avec les accords entre le royaume et l’Union européenne. Ce nouvel incident survient dans un contexte où les relations entre le Maroc et l’Union européenne semblent en phase de réchauffement.
En décembre 2024, lors d’une rencontre entre Rachid Talbi Alami, président de la Chambre des représentants marocaines, et Roberta Metsola, présidente du Parlement européen, les deux parties avaient souligné l’importance du dialogue et de la coopération. Pourtant, ces tensions sur le terrain, notamment liées à la situation du Sahara occidental, continuent de ternir les relations entre le Maroc et certaines institutions européennes.