Le sujet est très sensible. Le débat sur la laïcité prévu le 5 avril par l’UMP n’enchantent pas les Musulmans de France. Si certains ont du mal à aborder la question, d’autres en revanche n’hésitent pas à dire clairement ce qu’ils pensent. Rares sont ceux qui se positionnent en faveur de ce débat. Micro-trottoir à Paris et Montreuil.
La tension est palpable dans les propos de Léila. Cette mère de famille d’origine tunisienne revendique son attachement à la laïcité, même si « sa fille porte le voile » comme elle. A la question de savoir si ce débat doit avoir lieu, Léila lâche, un peu sur la défensive, qu’elle « ne sait pas ». Méfiance également perceptible chez Mohmoh à la Mosquée de Paris. « Pour le moment, ça va », affirme ce Marocain d’une soixantaine d’années, avant de s’esquiver pour faire sa prière.
Une parole plus libre
Pourtant, si le sujet paraît pour certains tabou, d’autres sont plus à l’aise pour dire ce qu’ils en pensent. C’est le cas de Myriam, qui sort de la salle de prière de la Mosquée de Paris. Cette étudiante en Master 2 de physique juge que « c’est un débat piégé. C’est de l’instrumentalisation à des fins politiques ». La jeune Kabyle, qui se revendique « musulmane » et « enfant d’immigré », estime qu’il n’est « pas nécessaire de définir un Islam de France ». « Les valeurs de l’Islam sont universelles. Il y a une minorité de la population qui se radicalise , mais cette branche était déjà mise à l’écart », assure t- elle.
Une liberté de parole que l’on retrouve également chez Nadir, lui aussi d’origine algérienne. « C’est de la politique politicienne. C’est triste. Il y a d’autres évidences et d’autres choses plus urgentes », affirme ce demandeur d’emploi d’une trentaine d’années. Il reconnaît qu’il ne « vient pas de la région parisienne, mais d’Orléans (centre-ouest). Ce qui est différent. Là-bas, le problème (la cohabitation interculturelle) se pose davantage. Même la médiatisation y est plus préjudiciable pour le citoyen lambda ».
« Ça ne me plaît pas »
Changement de ton pour Ibrahim Salim.« Ca ne me plaît pas », déclare ce Comorien d’une cinquantaine d’années. « Je suis musulman moi-même et je trouve ça très humiliant. C’est un abus de pouvoir, vraiment honteux de la part de l’Etat », affirme le Montreuillois.
A la question : que pensez-vous du débat sur la laïcité, Kahdi, jeune travailleuse d’origine sénégalaise, rétorque dans un premier temps « rien de spécial ». A la réponse de sa camarade Salimata, d’origine sénégalo-mauritanienne, « ça va encore être un débat polémique qui ne va pas nous avancer », Kahdi ajoute timidement « que les gens vont être plus stigmatisés ». « Le terme laïcité est un mot pour cacher le débat sur l’Islam en France », déclare ouvertement sa copine.
Enfin, il y a ceux, comme Séni, qui ne sont pas opposés au principe de ce débat. Pour ce Sénégalais d’une quarantaine d’années, « le débat, c’est bien ». Selon lui, les personnes seront enfin « amenées à se comprendre ». Une position que partage l’un de ses compatriote, Seck, qui estime tout de même que « ce n’est pas le moment » de soulever toutes ces questions.
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