
Elon Musk, l’un des entrepreneurs les plus influents de notre époque, alimente la controverse par ses projets futuristes, mais aussi pour son mode de vie. Récemment, son usage de la kétamine a refait surface dans l’actualité, soulevant des interrogations légitimes sur l’impact de cette substance sur son comportement, ses décisions d’affaires et sa vision du monde.
Lors de son apparition à la Conservative Political Action Conference, Musk a suscité de vives réactions en brandissant une tronçonneuse, en trébuchant sur ses mots et en remettant en question l’existence des réserves d’or de Fort Knox. Ces incidents ont ravivé les discussions sur son usage de la kétamine, un anesthésique dissociatif devenu populaire tant pour ses effets euphorisants que pour son potentiel thérapeutique contre la dépression résistante aux traitements conventionnels.
Son comportement erratique sur les réseaux sociaux, ses décisions d’entreprise parfois impulsives et ses déclarations publiques de plus en plus décalées soulèvent une question centrale : l’homme le plus riche du monde est-il sous l’emprise d’une substance qui altère son jugement ?
La kétamine : entre usage médical et dérives récréatives
La kétamine est un anesthésique approuvé depuis les années 1970, utilisé initialement en médecine vétérinaire puis humaine et, plus récemment, dans des protocoles thérapeutiques contre la dépression. En 2019, la FDA a franchi un pas significatif en approuvant une version de cette molécule sous forme de spray nasal, l’eskétamine, pour traiter spécifiquement les patients résistants aux antidépresseurs traditionnels.
Toutefois, son usage hors prescription a explosé ces dernières années, donnant naissance à une industrie florissante estimée à 3,5 milliards de dollars en 2023. Cliniques privées, thérapies alternatives et marché noir se sont développés autour de cette molécule aux effets puissants.
Si Musk affirme suivre un protocole médical encadré pour traiter une dépression diagnostiquée, certains témoignages de son entourage, rapportés par le Wall Street Journal et d’autres médias, évoquent une consommation plus libre, voire récréative. Selon une étude menée en 2010 par la psychopharmacologue britannique Celia Morgan, une consommation régulière de kétamine peut entraîner des troubles significatifs de la mémoire, des pensées délirantes et une dissociation marquée de la réalité.
Ces symptômes pourraient-ils expliquer les récentes déclarations parfois incohérentes de Musk sur les réseaux sociaux ou certaines décisions d’affaires controversées au sein de Tesla, X (anciennement Twitter) et SpaceX ?
Un visionnaire ou un homme déconnecté de la réalité ?
Les liens potentiels entre l’usage de la kétamine et le comportement de Musk préoccupent certains de ses proches collaborateurs et investisseurs. Ronan Farrow révélait dans un article du New Yorker en 2023 que plusieurs membres de l’entourage professionnel de Musk s’inquiétaient de son isolement croissant et de son état psychologique fluctuant.
Si la kétamine peut offrir un soulagement temporaire face à la pression intense qui pèse sur un personnage aussi médiatique et scruté, elle pourrait aussi, en cas d’usage inapproprié, accentuer une vision du monde déjà caractérisée par des projets grandioses et des ambitions démesurées.
Originaire d’Afrique du Sud, Musk a grandi jusqu’à l’âge de 17 ans dans ce pays alors sous le régime de l’apartheid, une politique de ségrégation raciale institutionnalisée. Ce contexte a profondément marqué sa formation intellectuelle et sociale. Peu connu du grand public, un élément généalogique éclaire son parcours : ses aïeux avaient délibérément choisi l’Afrique du Sud comme terre d’installation, attirés précisément par un système politique qui officialisait la domination de la minorité blanche. Cet héritage familial, rarement évoqué dans les hagiographies du milliardaire, offre une clé de lecture essentielle pour comprendre ses positions actuelles.
Une influence idéologique et économique
Ayant quitté le pays en 1989, peu avant la fin officielle de l’apartheid, Musk semble avoir conservé certaines conceptions politiques issues de cette période troublée où les ressources minières et l’exploitation à grande échelle ont façonné des ambitions hors normes. Ses récentes prises de position en faveur de mouvements et d’idéologies d’extrême droite sur les réseaux sociaux, son soutien affiché aux figures conservatrices les plus radicales et ses commentaires sur l’immigration suggèrent une nostalgie inquiétante de certains aspects de l’Afrique du Sud de sa jeunesse.
La kétamine, avec ses effets dissociatifs, pourrait amplifier ces tendances politiques problématiques en renforçant une vision binaire et simpliste du monde. Plusieurs experts en toxicologie comportementale suggèrent que les substances psychoactives peuvent exacerber les traits de personnalité préexistants, particulièrement les tendances autoritaires et les biais idéologiques.
Il n’est pas surprenant qu’il se perçoive aujourd’hui comme un acteur incontournable du futur de l’humanité, à la manière des grands magnats de l’industrie extractive. Ses projets d’exploration spatiale avec SpaceX, de colonisation martienne et ses ambitions transhumanistes avec Neuralink peuvent, sous cet angle, s’inscrire dans une logique d’expansion territoriale et d’exploitation des ressources, reflétant en partie l’héritage économique et politique de son pays d’origine.
Entre le génie entrepreneurial visionnaire et le risque de dérives psychologiques, Elon Musk continue de fasciner autant qu’il inquiète. Entre génie et folie, la frontière a toujours été ténue dans l’histoire des grands innovateurs.