Le phénomène Daymé Arocena débarque de Cuba : une vocaliste exceptionnelle, une improvisatrice jazzwoman hors-pair. Son premier disque vient de sortir : « The Havana Cultura Sessions ». Un hommage aux racines africaines de Cuba.
Nous l’avons découverte il y a quelques jours, au club de jazz « Le duc des Lombards », à Paris, qui reçoit les plus grands noms de la scène jazz mondiale : un petit bout de femme, ronde et joyeuse, pleine d’énergie et dotée d’un incroyable talent de vocaliste, notamment pour des improvisations et des inventions, avec sa seule voix, que nous avons rarement entendue dans l’histoire du jazz depuis ses débuts !
Car Daymé joue avec sa voix comme d’autres jazz(wo)men avec un piano, un saxo ou une trompette : avec une liberté qui nous époustoufle, car l’on se dit à chaque fois : « mais où a-t-elle eu l’idée de chercher ça ? ». Et surtout : on reste scotché par les performances techniques de telles vocalises, par exemple lorsque l’artiste passe subitement du très aigu au très grave, ou qu’elle entame des rythmes endiablés ou des changements brutaux de tempis.
Et puis, lorsqu’elle chante sur scène, Daymé Arocena semble totalement habitée, et son chant puise en effet dans les traditions musicales spirituelles de l’île. D’ailleurs, l’artiste apparaît sur scène toute vêtue de blanc -la couleur des prêtres et des prêtresses dans de nombreux rites religieux d’origine africaine, à Cuba comme ailleurs en Amérique Latine. En outre, la jeune femme s’est lancée, parallèlement à sa carrière musicale, dans l’étude des traditions de la Santeria, religion dérivée de la religion yoruba, et très présente à Cuba.
La jazzwoman n’a que 23 ans, mais elle promet ! Le producteur et journaliste anglais Gilles Peterson l’a découverte il y a quelques années, à Cuba : elle chantait dans la cuisine, chez des amis ! Epaté par sa voix, ce grand connaisseur des musiques du monde, qui a créé plusieurs festivals, des prix musicaux, et officie à la BBC Radio, référence musicale suprême, a attendu quelques années avant de l’enregistrer, sous son propre label, Brownswoodrecordings. Un petit EP de quatre titres vient de sortir, pour commencer, intitulé « The Havana Cultura Sessions », en attendant l’album « Nueva Era », prévu pour juin. (Le titre de ce premier EP se réfère au projet « Havana-Cultura », soutenu par la marque de rhum Havana Club, qui veut faire connaître au reste du monde la nouvelle génération d’artistes à Cuba, dans tous les domaines : musique, arts, littérature, etc.). C’est beau, le métier de découvreur de talents musicaux : bravo Gilles Peterson ! Et bravo Daymé !