Les inondations du 21 et 22 août dernier à Dakar mettent en lumière la fragilité du quotidien de la ville, complètement paralysée par les précipitations. Routes impraticables et défoncées, embouteillage, transport en commun cauchemardesques, réseau d’évacuation des eaux défaillant, beaucoup de Dakarois n’ont plus que leurs yeux pour pleurer.
De Dakar
Il suffit maintenant de quelques gouttes de pluies pour que tout s’arrête à Dakar. Les routes sont coupées, les maisons sont envahies par les eaux de pluie et d’égouts, même les lieux de travail. C’est comme si la ville était devenue une île avec la seule différence que les immondices partagent l’eau avec les populations. « Qu’avons-nous fait au bon Dieu pour mériter tout cela ? », s’écriait une dame comme pour dire que c’est une malédiction qui s’abat sur ce peuple qui se croit « tant aimé » par Dieu.
Depuis les pluies diluviennes qui sont abattues sur la capitale sénégalaise le week-end du 20 – 21 août 2005, les choses se sont empirées. De mémoire de dakarois, on n’a jamais vu une chose pareille. Et depuis lors, il n’arrête pas de pleuvoir. Tant mieux pour les cultures et « tant pis pour les citadins et les pouvoirs publics non prévenant », disait un cadre, fils de cultivateur.
D’aucuns ont une explication lapidaire du problème. « C’est l’occupation anarchique du sol, les gens sont allés habiter dans des bas-fonds ou d’anciens lits de cours d’eau où l’eau doit naturellement passer en cas de fortes pluies », tente de commenter Amadou, un passant rencontré dans la circulation. Conséquence : l’eau n’ayant plus de chemin de ruissellement vient envahir ses anciens lits qui se trouvent être des habitations, des bureaux, des routes, etc. Ajouté à cela le dysfonctionnement du réseau d’évacuation d’eaux usées, de pluie, toutes les conditions sont réunies pour assurer une inondation de première classe de la capitale sénégalaise.
Dans la rue, c’est un spectacle de désolation totale. L’autoroute qui relie la banlieue au centre ville est coupée en deux ; la seule route qui sort de Dakar connaît le même phénomène. Si par hasard la route est praticable, elle est parsemée de trous, de nids de poules très profonds qui ne laissent aucune chance aux petits véhicules. Conséquence, les rares routes praticables sont prises d’assaut par les automobilistes, ce qui crée des bouchons terribles au niveau de ces artères. Les plus malchanceux sont ceux qui prennent le transport en commun « Ndiaga Ndiaye » et autres « cars rapides ». Les chauffeurs de ces véhicules refusent d’accéder à certains endroits s’ils ne garent pas tout bonnement leurs guimbardes. Les passagers sont obligés de se taper des kilomètres à pied (ce n’est pas exagéré) pour regagner leur lieu de travail ou rentrer chez eux après une dure journée de labeur. La ville vit au ralenti ; le spectacle est tout simplement sombre.
À la télévision et dans les radios privées, les politiciens discourent en longueur de journée du plan « jaxaay », nom donné par le Président de la République à la solution qu’il préconise pour régler le problème. Ce plan prévoit d’injecter 52 milliards de francs CFA pour venir en aide aux sinistrés. Les fonds seront puisés particulièrement du budget des élections législatives. Pour cela, le Président propose de coupler les élections présidentielles aux législatives. Une façon d’endiguer les difficultés actuelles du parti au pouvoir, affirme l’opposition qui crie au scandale. Comme le titrait un grand quotidien de la place : « Wade met les élections 2006 dans l’eau ».
Par Barthélémy Sène
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