Le Togo connaît d’importantes difficultés d’approvisionnement en électricité. Face à l’augmentation de ses propres besoins, le Ghana, principal fournisseur du pays, ne peut plus couvrir ceux du Togo. Un problème structurel pour lequel des solutions sont actuellement en projet. Interview de Débo-K’mba Barandao, directeur général de l’Energie.
Afrik : Comment expliquer l’actuelle crise énergétique au Togo ?
Débo-K’mba Barandao : Il s’agit d’un problème structurel. Le Ghana est notre principal fournisseur d’électricité. Mais la reprise économique enregistrée dans le pays a suscité une augmentation des besoins intérieurs. Le Ghana n’est plus en mesure de nous approvisionner totalement. Ses capacités d’exportation issues de son important barrage hydroélectrique ne sont plus suffisantes pour fournir la Communauté électrique du Bénin (entreprise publique bénino-togolaise chargée d’importer l’électricité pour approvisionner Togo Electricité, responsable de la distribution, ndlr).
Afrik : Quels sont les besoins nationaux ?
Débo-K’mba Barandao : Nous consommons près de 450 gigawatts/heure. Nous avons au Togo notre propre barrage hydroélectrique mais il ne fournit en moyenne que 150 gigawatts/heure. Togo Electricité dispose également de petites centrales thermiques d’appoint mais leurs capacités de production sont marginales.
Afrik : Quelles solutions envisage le Togo pour gérer cette crise ?
Débo-K’mba Barandao : Nous avions d’abord pensé à importer de l’électricité de Côte d’Ivoire, via le réseau ghanéen. Mais d’une part la vétusté des lignes construites entre le Togo et le Ghana ne permettent pas de faire transiter de trop importantes capacités d’énergie. D’autre part il y a un problème de coût.
Afrik : C’est-à-dire ?
Débo-K’mba Barandao : Le Ghana n’est pas très favorable au transit, via son réseau, de l’électricité ivoirienne vers le Togo. Il taxe le transport et opère un prélèvement d’énergie pour ses propres besoins. Au final, cette solution s’est avérée trop onéreuse : le kilowatt/heure nous revient plus cher que lorsque nous importons directement du Ghana.
Afrik : Comment faites-vous au jour le jour pour faire face à la pénurie ?
Débo-K’mba Barandao : Maintenant nous sommes obligés de combler le déficit énergétique avec les turbines à gaz que nous avions installées en catastrophe en 1998 suite à la pénurie électrique due à la sécheresse (la sécheresse handicapait le fonctionnement des centrales hydroélectriques, ndlr). Ces turbines fonctionnent normalement au gaz naturel mais comme actuellement nous n’en avons pas, nous les faisons tourner avec du Jett fuel, du carburant d’avion. Une solution onéreuse mais un peu moins chère que la solution ivoirienne.
Afrik : Cela reste tout de même une solution à court terme. Existe-t-il des projets pour régler le problème énergétique de manière plus structurelle ?
Débo-K’mba Barandao : La réhabilitation d’une ancienne centrale thermique, installée dans les années 80 pour alimenter une aciérie mais qui n’avait pas beaucoup fonctionné, est en cours. Une concession a été accordée à l’entreprise Electro Togo. La centrale devrait développer sa pleine capacité aux alentours de 2005. Et puis il y a le gazoduc d’Afrique de l’Ouest. Il devrait être opérationnel mi 2005 (il transitera off shore du Nigeria jusqu’au Ghana, ndlr). Nous allons pouvoir nous fournir en gaz naturel, ce qui nous permettra d’utiliser normalement nos turbines à gaz et de développer notre parc.