Crânes Sakalava : Macron promet un retour, Madagascar attend encore


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Illustration crane

En visite d’État à Madagascar, Emmanuel Macron a promis la restitution prochaine des crânes Sakalava, symboles du passé colonial douloureux entre la France et l’île. Un geste fort mais reporté à août, dans un climat partagé entre attentes mémorielles, respect des traditions et prudence diplomatique.

Emmanuel Macron a entamé une visite d’État hautement symbolique à Madagascar, marquée par une promesse forte : la restitution des crânes Sakalava, dont celui présumé du roi Toera, conservés depuis des décennies en France. Ce geste, censé incarner une avancée majeure dans le dialogue mémoriel entre les deux pays, a toutefois été repoussé à août prochain. Un délai imposé par des divergences entre les descendants du roi Sakalava et le respect du calendrier coutumier malgache. Malgré ce report, le président français a réaffirmé sa volonté d’engager un processus durable de réconciliation et de reconnaissance historique.

Une première étape vers une mémoire partagée

Depuis le Rova, palais royal de Tananarive, Macron a évoqué avec émotion la charge symbolique de cette restitution. Accompagné de la princesse Rastimamanga, descendante de la dynastie royale malgache, il a souligné l’importance de « retirer cette épine » douloureuse. Pour lui, ce rapatriement ne constitue qu’un premier jalon. Il aspire à la création d’une commission mémorielle, sur le modèle de celles mises en place pour le Rwanda, le Cameroun ou encore l’Algérie. L’objectif : initier une dynamique de vérité et de mémoire entre la France et Madagascar, trop longtemps marquée par le silence.

Tout en abordant avec gravité les événements sanglants de 1897 et 1947, liés à la répression coloniale française, Emmanuel Macron s’est gardé de formuler des excuses explicites. Il a préféré insister sur la nécessité de permettre le deuil, de restituer les objets et les restes humains à leurs légitimes gardiens, tout en soulignant que le pardon relève d’une démarche personnelle et intime. Ce choix d’une reconnaissance sans repentance officielle laisse certains Malgaches sur leur faim, notamment les partisans d’une réparation morale complète pour les violences de l’époque coloniale.

Une restitution qui interroge le rapport au passé colonial

Ce report de la restitution des crânes Sakalava illustre toute la complexité des politiques mémorielles post-coloniales. Entre le poids des traditions, les tensions intergénérationnelles et les attentes des sociétés civiles, chaque geste diplomatique est minutieusement scruté. Pour Madagascar, le retour des crânes représente un enjeu identitaire profond, un acte de réparation historique à forte charge symbolique. Pour la France, il s’agit aussi de réaffirmer une posture internationale de transparence et d’écoute, tout en évitant les pièges du passé.

En promettant la restitution prochaine des crânes, Emmanuel Macron a ouvert la porte à un dialogue mémoriel ambitieux avec Madagascar. Reste à savoir si les paroles seront suivies d’actes, et si ce geste sera suffisamment fort pour apaiser les mémoires blessées. La cérémonie prévue en août prochain sera, à ce titre, un moment décisif. Ce sera alors aux historiens, aux familles royales et aux citoyens de part et d’autre de transformer cette promesse en acte fondateur d’une nouvelle ère franco-malgache.

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