Les perturbations électriques au Nigeria contaminent le réseau togolais, provoquant une nouvelle vague de coupures d’électricité dans le pays. Cette énième crise met en lumière la dangereuse dépendance énergétique du Togo envers son grand voisin, dont les infrastructures vieillissantes menacent régulièrement l’approvisionnement de toute la région.
Les coupures d’électricité se sont multipliées ces derniers jours au Togo, en raison de perturbations sur le réseau électrique nigérian. Cette situation révèle la vulnérabilité du système électrique togolais, dépendant de ses voisins pour plus de la moitié de ses besoins, et pose la question d’une politique énergétique durable et autonome.
Une dépendance énergétique historique en Afrique de l’Ouest
La dépendance énergétique du Togo vis-à-vis de ses voisins, notamment du Nigeria et du Ghana, n’est pas un phénomène récent. Elle remonte aux années post-indépendance, lorsque les pays d’Afrique de l’Ouest ont cherché à s’appuyer sur les économies plus grandes et plus riches en ressources naturelles pour répondre à leurs besoins en énergie. Le Nigeria, avec ses ressources en hydrocarbures, et le Ghana, grâce à l’énergie hydraulique, se sont imposés comme des fournisseurs principaux pour le Togo, dont les infrastructures de production locale sont restées modestes.
Dans les années 1980, des accords de fourniture ont renforcé cette relation de dépendance, mais celle-ci rend le Togo vulnérable aux aléas de ses voisins, comme les récentes perturbations sur le réseau électrique nigérian l’ont encore montré.
Une fragilité exacerbée par les crises du réseau nigérian
La Compagnie Énergie Électrique du Togo (CEET) a annoncé le 7 novembre de nouvelles interruptions dans la fourniture d’électricité, imputables à une perte de tension provenant du Nigeria. Ce nouvel épisode est loin d’être un cas isolé : le réseau nigérian a connu onze incidents majeurs depuis le début de l’année, parfois avec une production bien en deçà des besoins du pays lui-même. Ces perturbations ont des effets directs sur le Togo, dépendant de cette fourniture pour garantir la stabilité de son propre réseau.
Le Nigeria est aux prises avec des infrastructures vieillissantes, un manque chronique d’investissements et des défis liés à la corruption. Depuis les années 2000, le pays a tenté de privatiser son secteur énergétique, espérant attirer des capitaux et des compétences pour moderniser ses équipements, mais ces efforts restent insuffisants face à une demande énergétique qui ne cesse de croître.
Les conséquences des coupures au Togo : vie quotidienne et économie en péril
Les coupures répétées d’électricité au Togo ont des répercussions lourdes sur la vie quotidienne et l’économie du pays. Entreprises, hôpitaux, écoles et ménages subissent des interruptions de service, entraînant des pertes de production, des retards dans la prestation de services essentiels et une détérioration des conditions de vie. La CEET mobilise ses moyens de production pour limiter l’impact, mais cette réponse reste insuffisante face aux besoins croissants.
Pour réduire sa dépendance envers les importations d’électricité, le Togo explore depuis une décennie des voies de diversification énergétique. En 2018, le gouvernement a lancé une politique ambitieuse visant à atteindre 50 % d’énergie renouvelable d’ici 2030. Des projets, comme la centrale solaire de Blitta, inaugurée en 2021, illustrent cette volonté de se tourner vers des sources alternatives. Ce projet, l’un des plus grands en Afrique de l’Ouest, marque une étape vers la réduction de la dépendance énergétique du système électrique togolais.
En parallèle, le Togo participe à des initiatives régionales comme le West African Power Pool (WAPP), créé en 1999 par la CEDEAO pour faciliter les échanges d’électricité entre les réseaux nationaux. Le renforcement de ces interconnexions avec d’autres pays pourrait également sécuriser l’approvisionnement en électricité.
Un enjeu géopolitique pour l’Afrique de l’Ouest
Le défi énergétique du Togo est aussi un enjeu géopolitique pour l’Afrique de l’Ouest, une région marquée par des tensions autour de l’accès aux ressources. La dépendance énergétique ne se limite pas aux difficultés économiques ; elle reflète un jeu d’influence où des puissances régionales, comme le Nigeria et le Ghana, jouent un rôle stratégique. Dans ce contexte, la coopération avec des partenaires internationaux, comme la Chine ou l’Union européenne, pourrait être décisive pour financer de nouvelles infrastructures, renforcer la sécurité énergétique régionale et contribuer à une meilleure intégration énergétique.
Le développement d’interconnexions régionales et l’investissement dans des infrastructures locales permettraient également d’atténuer les effets des crises des réseaux voisins. L’enjeu pour le Togo est donc de réduire une dépendance qui, bien que historiquement ancrée, limite son développement économique.