La ville de Duékoué, dans l’Ouest du pays a connu, dans la nuit de mardi à mercredi, une tragédie qui a fait plus d’une cinquantaine de morts et de nombreux blessés. Des batailles autour du foncier rural seraient à l’origine du drame qui intervient dans une Côte d’Ivoire qui cherche le chemin de la paix.
«Quarante et un morts, soixante-quatre blessés, onze corps calcinés et une trentaine de cases incendiées », c’est le triste bilan, de la tuerie qui s’est déroulée, dans la banlieue Nord de Duékoué, dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire, dans la nuit du mardi à mercredi derniers. L’information a été donnée par le lieutenant-colonel Yao Yao Jules, porte-parole des Forces de défense et de sécurité. Selon lui, les attaquants se sont servis d’armes à feux et d’armes blanches pour perpétrer leurs méfaits dans les villages de Petit Duékoué et de Guetrozon. Si les agresseurs n’ont pas encore été officiellement identifiés, plusieurs témoins parlent de Dozos. Les Dozos sont des chasseurs d’élite aux pouvoirs magiques en pays mandingue (on retrouve les mandingues dans le Nord de la Côte d’Ivoire) parmi lesquels nombre d’imposteurs se glissent souvent en arborant leur tenue vestimentaire très distinctive.
Une affaire d’intérêts et de terres
Ce carnage serait, selon plusieurs observateurs, le résultat d’une tension grandissante qui perdure dans cette ville cacaoyère et caféière qui compte entre 50 et 70 000 habitants. A l’origine de cette situation, le foncier rural. Les autochtones – les Wé et les Guéré – sont en conflit, notamment depuis 1997, avec les allogènes ivoiriens ou étrangers – Senoufo (Nord), Baoulé (Centre) ou Burkinabé – qui se disputent les terres cultivables. Des terres qui s’amenuisent notamment du fait de la disparition de la forêt (milieu propice à la culture du café et du cacao) et compte tenu de la croissance de la population. Une situation qui est, semble-t-il, fortement instrumentalisée par les politiciens locaux qui en font une question ethnique. Un sujet, qui depuis quelques années maintenant, met très vite le feu aux poudres dans une Côte d’Ivoire en crise.
Une enquête policière est actuellement conduite pour déterminer les responsables de ce massacre. Ce drame intervient à l’heure où la Côte d’Ivoire divisée en deux, entre les rebelles et le pouvoir, tente de poser inexorablement les jalons de la paix. Une paix que le pays appelle, certes de tous ses vœux, mais qui ne mettra pas de si tôt fin à des antagonismes, qui tiennent parfois à de simples conflits d’intérêts entre des populations d’origines ethniques diverses, qui vivaient auparavant en bonne entente.