Côte d’Ivoire : restitution du tambour Djidji Ayôkwé par la France


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Djidji Ayôkwé

Le légendaire tambour Djidji Ayôkwé, symbole de l’histoire et de la résistance des Atchans, sera bientôt restitué à la Côte d’Ivoire après plus de 100 ans d’absence.

Après des années de traités et de débats, le légendaire tambour parleur ivoirien, le Djidji Ayôkwé, s’apprête à faire son retour en Côte d’Ivoire. Mais ce retour suscite à la fois espoirs et interrogations sur les blessures du passé et les défis de la restitution du patrimoine africain.

Un retour très attendu, mais encadré

Le Djidji Ayôkwé, un tambour parleur d’une importance historique et spirituelle inestimable pour la communauté Atchan, sera bientôt prêté à la Côte d’Ivoire. L’annonce officielle est attendue ce lundi 18 novembre, à Paris, lors de la signature d’une convention de dépôt entre la France et la Côte d’Ivoire. Ce prêt marque la première étape avant un transfert définitif, prévu après l’adoption d’une loi spécifique par le Parlement français.

Depuis son pillage en 1916 par les colons français, cet imposant tambour de 3,31 mètres de long et pesant 430 kilos repose au musée du Quai Branly à Paris. Bien que symbolique, cette restitution partielle soulève des questions sur la lenteur du processus, déjà promise par le président Emmanuel Macron en 2018.

Le Djidji Ayôkwé : un témoin du passé

Ce tambour, capable autrefois de transmettre des messages codés audibles sur plus de 20 kilomètres, jouait un rôle central dans la vie sociale, politique et spirituelle des Atchans. Au-delà d’un simple instrument de communication, il était un outil de résistance contre les colons. En 1916, son usage pour prévenir les villages de l’arrivée des colons venus imposer le travail forcé a conduit à sa confiscation.

Pour les Atchans, la perte de ce tambour symbolisait la capitulation de tout un peuple. « C’était plus qu’un objet : c’était l’âme de notre communauté », raconte Guy Djagoua, chef traditionnel bidjan. Aujourd’hui, le tambour revient chargé de mémoire, mais incapable de parler : les ravages du temps et des insectes l’ont rendu silencieux.

Un processus de restitution semé d’embûches

En France, le retour du Djidji Ayôkwé se heurte au principe d’inaliénabilité des biens culturels. Un projet de loi spécifique doit être voté pour permettre sa restitution définitive. En attendant, un partenariat scientifique entre les deux pays permettra d’anciens conservateurs ivoiriens en restauration patrimoniale.

Pour la communauté Atchan, cette restitution est aussi une forme de réconciliation. Depuis l’annonce de son retour, les villages atchans ont repris les réunions mensuelles, interrompues depuis un siècle. Toutefois, certains observateurs estiment que cette restitution ne suffit pas à effacer les blessures laissées par le pillage colonial.

Un geste historique ou un simple symbole ?

Si le retour de Djidji Ayôkwé suscite une grande joie en Côte d’Ivoire, il met également en lumière les limites et complexités des restitutions patrimoniales. « Ce tambour ne pourra jamais retrouver sa voix ni sa fonction originelle », souligne Silvie Memel-Kassi, directrice de la Culture ivoirienne. Pourtant, son retour est perçu comme un premier pas vers la reconnaissance des torts passés et une nouvelle ère de coopération culturelle entre la France et l’Afrique.

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