Le Front populaire ivoirien s’est retiré du processus de paix et du gouvernement de Charles Konan Banny. Pascal Affi Nguessan, président de la formation au pouvoir, a accepté malgré son agenda chargé de nous donner quelques explications pour comprendre cette décision.
Pourquoi le Front populaire ivoirien s’est-il retiré du processus de paix et du gouvernement ? Beaucoup se posent la question après l’annonce de ce retrait, mardi, par Pascal Affi Nguessan, président du FPI (au pouvoir). Si la non prolongation du mandat des députés par le Groupe de travail international semble avoir été la goutte d’eau qui a entraîné la décision, le responsable évoque également la déception du FPI face à un processus de paix qui piétine. Malgré un emploi du temps très chargé, il a accepté de répondre à quelques questions.
Afrik.com : Certains parlent de recommandation et non de décision du Groupe de travail international concernant la non prolongation du mandat des députés. Qu’en dites-vous ?
Pascal Affi Nguessan : Le Gti essaye de faire passer cela comme une décision. Ce n’est pas la première réunion qu’ils tiennent et à la suite de laquelle ils publient un communiqué pour dire les décisions qu’ils ont prises. Sur le principe, c’est inadmissible qu’un organisme de la communauté internationale puisse s’attaquer au pouvoir législatif. C’est contraire à la mission de l’Onu (Organisation des Nations Unies, dont la résolution 1633 a créé le Gti, ndlr) de promouvoir le droit. C’est une agression. Tout cela donne à cette structure un caractère nocif.
Afrik.com : Certains accusent le FPI d’« orchestrer » les manifestations des Jeunes Patriotes. Que répondez-vous ?
Pascal Affi Nguessan : Nous nous rejoignons. En Côte d’Ivoire, nous ne sommes pas les seuls à réfléchir. Nous sommes tous concernés par ce qui se passe dans notre pays. Tout autant que nous sommes outrés par ce qui arrive, nos militants et d’autres Ivoiriens le sont aussi. Il n’y a pas de statistiques, mais beaucoup de Jeunes Patriotes épousent notre cause. Ils comptent aussi des sympathisants d’autres partis.
Afrik.com : Vous qualifiez la décision du Gti comme un « coup d’Etat ». C’est un terme très fort…
Pascal Affi Nguessan : Un coup d’Etat constitutionnel est caractérisé par le fait qu’une autorité ou qu’une force dissolve une instance de l’Etat pour instaurer un régime d’exception, sous lequel les pouvoirs sont souvent confondus et ou le pouvoir exécutif est fort. Ce que le Gti a fait vise à cela. Supprimer le pouvoir législatif et faire des députés des agents du pouvoir exécutif que le Premier ministre (Charles Konan Banny) pourrait envoyer en mission dans le cadre du processus de paix et de réconciliation.
Afrik.com : Certains disent que par votre geste vous ne cherchez pas à obtenir une paix durable…
Pascal Affi Nguessan : Ils n’ont pas une lecture objective de tous les sacrifices et concessions que nous avons faites jusqu’à présent au nom de la paix. J’ai moi-même abandonné mon portefeuille de Premier ministre pour favoriser la paix et la mise en place d’un gouvernement de réconciliation nationale. Notre groupe parlementaire a fait des efforts et, malgré tout, il n’y a toujours pas de réconciliation. C’est parce que nous sommes excédés que nous avons quitté le processus de paix. A partir du moment où il ne fait pas avancer les choses, il était dans la logique que nous le quittions. Et c’est parce que le gouvernement est un organe de ce processus que nous l’avons aussi quitté. On ne pouvait pas rejeter le processus et rester au gouvernement.
Afrik.com : Vous rejetez aussi les soldats de l’Onu et de la France…
Pascal Affi Nguessan : Ils font partie du processus de paix, il est donc normal que nous les rejetions aussi. Nous remettons en cause tous les éléments constitutifs de ce processus, leur existence même. Mais nous restons dans l’Onu et l’Union africaine.
Afrik.com : Craignez-vous des sanctions ?
Pascal Affi Nguessan : Quand on a la conviction qu’on se bat pour la paix et son pays, on n’a peur de rien, même pas des fusils. La violation de l’intégrité d’un pays est bien plus à craindre que les armes. Mais si nous étions sanctionnés, ce serait vraiment injuste et cela montrerait un manque d’objectivité.